Canular ou pas? C'est la question que tous se poseront à la sortie de Catfish, documentaire qui pourrait être documenteur relatant les liens qu'un jeune photographe new-yorkais a créés avec une fillette du Michigan, puis avec sa soeur aînée. Le tout né sur Facebook. Et débouchant sur quelques surprises. Pour qui? Pourquoi? Motus et bouche cousue. Ou presque...

Ne dites à personne ce que c'est: ce n'est pas la supplique -ils ne sont pas du genre à supplier- mais la demande, à la fois souriante et pressante, des trois jeunes hommes à l'origine de Catfish, documentaire (ils jurent, «parole de scout», que tout y est véridique) ou documenteur (pourraient avancer les sceptiques). Même les notes de production que reçoivent les journalistes appelés à parler d'une oeuvre cinématographique contiennent un avertissement: «Nous recommandons fortement de ne lire cette section qu'après avoir vu le film.»

Alors, on écrit quoi? «Écrivez que c'est l'histoire de trois amis et d'un véritable amour, que c'est une histoire qui parle de nous tous et à nous tous», résument les réalisateurs Henry Joost et Ariel Schulman, de même que la figure centrale du documentaire, le frère du deuxième, Nev Schulman -rencontrés à Toronto dans un hôtel chic «dont le prix de deux nuits équivaut au budget de notre film», rigole Henry Joost.

Catfish, donc, c'est l'histoire de Nev. Il est photographe à New York. Un jour, Abby, 8 ans, du Michigan prend contact avec lui au moyen de Facebook. Elle lui demande si elle peut utiliser une de ses photos comme point de départ à une peinture. Amusé, Nev accepte. Qu'elle peigne. Et qu'elle devienne son «amie Facebook». Surprise quand il reçoit l'oeuvre de la fillette. La qualité est remarquable. Les contacts entre eux se multiplient. S'étendent à la famille. La mère. La soeur aînée. Très belle. Échanges de photos. Conversations téléphoniques.

«J'ai senti qu'il y avait là la possibilité d'un amour. Toutes les pièces étaient là», note Nev Schulman. Et parce que ses sentiments étaient ainsi, il a décidé d'aller rencontrer la belle Megan. Début d'une manière de road trip à trois, Nev étant accompagné d'Ariel et Henry. Et de leurs caméras.

«Nous sommes inséparables. Nev est mon frère et Henry, mon meilleur ami, indique Ariel Schulman. Et il se trouve qu'on filme tout, tout le temps. Quand Nev a commencé sa relation avec une jeune artiste, c'est tout naturellement qu'on l'a filmé. Quand c'est devenu une histoire d'amour avec la soeur aînée, on a continué. Parce qu'on trouvait ça intéressant.» «Mais il n'y avait pas de grand plan, de grande idée, ajoute Henry Joost. On pensait peut-être faire un court métrage avec ça, tout en continuant à travailler en publicité.» Et Nev de laisser aller: «N'oubliez pas qu'à chaque minute où ils me filmaient, ils se filmaient entre eux, eux aussi. Ils ont toujours une caméra à la main. Ça se faisait de manière naturelle.»

Mais soudain, les choses ont changé. Et Catfish est devenu le projet prioritaire. Tension, alors, entre les deux copains et le jeune frère, soudain déstabilisé. «Il y a eu des moments où je n'ai plus été sûr de vouloir être filmé, admet Nev. Mais je leur ai fait confiance jusqu'au bout.» Il a eu raison. Ces neuf mois de tournage et cette année et demie de montage débouchent sur un documentaire (?) des plus originaux, duquel émergent plusieurs questions concernant les réseaux sociaux, l'utilisation que l'on en fait. Et que certains de nos «amis» peuvent en faire.

Mise en garde? Il y a de cela, dans Catfish. De ça, et un peu plus. Selon que l'on soit chat ou poisson.

Catfish prend l'affiche le 24 septembre. Les frais de voyage ont été payés par Alliance Vivafilm.