Le Festival du nouveau cinéma sera lancé ce soir avec10 1/2, un drame social dans lequel un éducateur maintient l'espoir de réchapper un garçon de 10 ans et demi jugé irrécupérable. Daniel Grou-Podz met aujourd'hui son nouveau film au monde. Et ça le stresse...

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Même si Les 7 jours du talion, son premier long métrage, a été montré dans plusieurs festivals de cinéma (parmi lesquels celui de Sundance), Daniel Grou-Podz reste fébrile à l'idée de lancer un film dans le cadre d'un événement comme le Festival du nouveau cinéma.

«Je n'aime pas beaucoup aller parler en avant! a-t-il confié hier au cours d'une entrevue accordée à La Presse. Cela dit, je suis très flatté que 10 1/2 ait été choisi pour ouvrir ce festival prestigieux, dont la programmation est très riche. Et puis, le film est lancé chez moi cette fois. Toute l'équipe y sera.»

Le film 10 1/2 s'ouvre sur une scène étonnante (et plutôt courageuse). Laquelle situe parfaitement l'état d'esprit dans lequel se trouve le gamin, tout autant que l'univers un peu trash qui nourrit son imaginaire. Plutôt que d'emprunter une approche analytique propre à un cinéma social, tel qu'il fut pratiqué à une certaine époque au Québec à tout le moins, Podz s'est intéressé au parcours de cet enfant «à problèmes» de façon très concrète.

«C'est ce qui m'a accroché dès le départ, affirme-t-il. J'ai été impliqué dans ce projet alors qu'il n'existait encore qu'un synopsis. J'ai tout de suite aimé le fait qu'aucun jugement ne soit porté sur l'enfant, sur les éducateurs, sur les parents, sur le système. On expose la situation avec le plus de vérité possible, tout simplement.»

Cette vérité provient bien entendu de la propre expérience du scénariste Claude Lalonde (Les 3 p'tits cochons, Filière 13). Avant de consacrer tout son temps à l'écriture, Lalonde a lui-même été un intervenant en psychiatrie et en délinquance. Le scénario de 10 1/2 est forcément nourri de son expérience.

«Mais je ne voulais pas tomber dans l'analyse, ni dans les explications inutiles, prévient toutefois Podz. D'où cette approche très directe.»

Des acteurs crédibles

Entretenant une relation professionnelle privilégiée avec Claude Legault, le cinéaste a évidemment pensé tout de suite à la vedette de Minuit, le soir et des 7 jours du talion pour incarner l'éducateur attitré du gamin.

«C'est tout naturel, précise-t-il. Nous n'avons pas besoin de nous parler pour nous comprendre. Cela dit, Claude a beaucoup tourné. Avec moi et avec d'autres. On doit toujours trouver le moyen de se réinventer.»

Pour que 10 1/2 existe, il fallait aussi trouver un garçon capable de donner le change. Un jeune acteur crédible dans un rôle aussi colossal - et très physique - ne court évidemment pas les rues. Podz a pourtant trouvé sa perle rare assez rapidement.

«J'aimerais bien raconter une histoire très glamour en disant que nous avons dû rencontrer des milliers de garçons partout au Canada avant de trouver notre Tommy, mais ce ne fut pas le cas.

«D'autant plus qu'un film comme celui-là ne peut pas exister si l'acteur n'est pas crédible dans le personnage. Nous avons été très chanceux. Nous avons auditionné environ 25 jeunes garçons, tous déjà dotés d'une expérience professionnelle. Robert Naylor est le seul qui n'a jamais décroché pendant les improvisations au cours desquelles il donnait la réplique à Claude. Tommy, c'était lui. Pratiquement tous les autres enfants ont quand même obtenu des rôles secondaires dans le film.»

Robert Naylor, qui offre en effet une performance saisissante, se glisse ainsi dans l'âme écorchée d'un enfant enragé qui se promène dans les dédales du système des services sociaux. Jugé irrécupérable par la plupart des éducateurs du nouveau centre où il échoue, le garçon est en proie à de violentes crises. Et éprouve même la patience du seul éducateur qui voit encore en lui, peut-être, un espoir de réhabilitation.

«J'ai procédé avec Robert de la même manière qu'avec Claude. C'est-à-dire qu'on est dans l'instant, plus dans la fabrication de la scène que dans sa psychologie», explique celui qui, acquiesçant à une demande que lui a faite son père sur son lit de mort, signe désormais ses oeuvres de son vrai nom.

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10 1/2 ouvre ce soir le 39e Festival du nouveau cinéma de Montréal (sur invitation seulement). Présentation demain à 17 h au Cinéma Parallèle. En salle le 29 octobre.