300, King Kong, The Lord of the Rings, Matrix... Nommez un film fantastique ou de science-fiction des 10 dernières années et vous verrez probablement le nom de Mathieu Raynault apparaître à son générique. Depuis 2006, cet expert des effets spéciaux originaire de Saint-Bruno codirige le studio Rodeo FX. L'entreprise montréalaise accumule les contrats autant à Hollywood qu'au Québec. Son plus récent projet: Incendies de Denis Villeneuve.

Après un baccalauréat en architecture et une formation au centre NAD*, Mathieu Raynault s'est spécialisé dans le matte painting. Cette technique consiste à dessiner des arrière-plans virtuels où l'on intègre des scènes pour le cinéma, la publicité ou les jeux vidéo. Un matte painter (ou décorateur numérique) détient au moins des bases de peinture, de photographie et d'infographie 3D.

«J'adore ce métier parce qu'il est artisanal», dit le jeune homme qui se considère à la fois comme un artiste et comme un technicien.

S'il excelle à créer des métropoles futuristes ou des paysages fantastiques pour des blockbusters américains, Mathieu Raynault apprécie participer à des projets techniquement plus modestes. Son studio a eu le mandat de retravailler une quarantaine de plans d'Incendies, nouveau film de Denis Villeneuve. «On a pris des images de villes, qui avaient été tournées en Jordanie, on les a salies, on les a brûlées, comme si c'était la guerre», explique l'artiste.

Subtilité d'exécution

Le matte painting tire parfois sa force de la subtilité de l'exécution, comme dans le cas d'Incendies. «C'est un grand film d'auteur, mais pas un gros film en matière d'effets visuels, dit-il. Le but, c'est que nos effets ne paraissent pas. Si les gens n'en parlent pas, ça veut dire qu'on a réussi.»

Mathieu Raynault parle d'une collaboration enrichissante, teintée de confiance mutuelle avec Denis Villeneuve. Il regrette de ne pas vivre plus souvent ce genre de proximité avec les cinéastes. Lorsqu'il traite avec Hollywood, il répond la plupart du temps au superviseur des effets spéciaux.

«Sur un gros projet, je peux rarement parler au réalisateur. Ce serait presque impossible pour Spielberg de superviser quatre boîtes à la fois», note-t-il.

Mathieu Raynault est entré dans les ligues majeures à l'âge de 26 ans lorsqu'il a été embauché par ce club très fermé qu'est Industrial Light & Magic, société d'effets spéciaux fondée par George Lucas. Une de ses premières tâches: travailler à Star Wars: Episode II. Il a ensuite parcouru le monde en tant que pigiste, se bâtissant un curriculum enviable qui l'a placé parmi l'élite du matte painting. Il a décidé de rentrer au bercail il y a quatre ans.

Avec son collègue Sébastien Moreau, spécialiste du compositing (l'étape de finition dans le traitement des images numériques), Raynault a ouvert sa propre firme dans le Vieux-Montréal. Rodeo FX connaît une expansion fulgurante: 20 employés y travaillaient à temps plein en 2009. Cette année, ce chiffre a doublé. «On a de quoi être fiers, dit-il. On crée de l'emploi et on touche à de grandes productions américaines.»

*LE CENTRE NAD

Situé à Montréal, le Centre national d'animation et de design (NAD), où a étudié Mathieu Raynault, est un établissement de formation, de recherche et développement en animation 3D, effets visuels, design et arts numériques. Depuis 2010, l'institution offre un programme de baccalauréat en partenariat avec l'Université du Québec à Chicoutimi. Le Centre NAD a formé plus de 1200 animateurs 3D qui travaillent dans les domaines de la production cinématographique et télévisuelle ainsi que du divertissement électronique.