Le Chilien Sebastian Silva, réalisateur de La Nana - La bonne, Grand Prix à Sundance en 2009, revient cette année avec un film sur la maladie d'Alzheimer, interprété par une actrice de 89 ans, Belgica Castro, l'un des «mythes de la culture chilienne».

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Old Cats, coréalisé par Sebastian Silva et Pedro Peirano, est présenté en compétition au festival de cinéma indépendant, qui se tient jusqu'à dimanche à Park City, dans les montagnes de l'Utah.

Il raconte la journée mouvementée d'une femme âgée, Isadora, en proie aux premières manifestations de la maladie d'Alzheimer, qui reçoit sans grand enthousiasme la visite impromptue de sa fille Rosario, chroniquement instable.

Avec la complicité de son mari Enrique, elle décide de ne rien dire ni laisser paraître à sa fille, dont la visite n'a d'autre objectif que de faire signer à sa mère un document pour mettre la main sur son appartement.

«Je trouvais intéressant de montrer comment les premiers symptômes de la maladie d'Alzheimer chez une femme âgée peuvent être une source de conflits pour les personnages, et comment cette femme réagit quand sa tête commence à lui faire défaut», déclare Sebastian Silva à l'AFP.

Le film, qui commence de façon lente et contemplative, change du tout au tout au bout d'une demi-heure, quand Rosario fait irruption dans l'appartement - et dans l'histoire. «C'était mon intention que la fille viennent tout bouleverser. Rosario casse le style du début, comme si on avait deux films différents», explique Sebastian Silva.

Bavarde, exubérante et hyperactive - sous l'effet de la cocaïne qu'elle sniffe aux toilettes toutes les vingt minutes - Rosario n'a de cesse, avec la complicité de sa compagne, de convaincre sa mère de signer le fameux document. Mais la vieille femme et son mari ne l'entendent pas ainsi, et la situation se dégénère en règlement de comptes familial, souvent drôle.

«Je considère le film comme un drame plus que comme une comédie. Dans La Nana, il y avait déjà ce mélange. Mais c'est un humour basé sur des situations de la vie quotidienne, par sur des blagues», remarque le cinéaste.

Pour Sebastian Silva, l'objectif premier du film, avant même son thème ou son traitement, était de «travailler avec Belgica Castro et Alejandro Sieveking», couple à l'écran mais également à la ville, depuis près de 40 ans.

«Ils sont comme un mythe de la culture chilienne. J'avais travaillé avec eux sur mon premier film, La vida me mata (La vie me tue) et nous étions devenus amis. Je voulais refaire quelque chose avec eux, quoi que ce soit», dit-il.

Le film est devenu une histoire très intime pour les deux acteurs, car tout le tournage s'est déroulé dans leur propre appartement. «Tout ce que l'on voit dans le film est à eux. Jusqu'aux chats. Cela avait une charge émotionnelle énorme», affirme le réalisateur.

«Belgica a beaucoup pleuré quand elle a vu le film», dit-il. «L'expérience fut très cathartique pour elle car les conflits vécus par son personnage, elle les a aussi vécus avec nous. Isadora est violée dans son intimité par l'irruption de sa fille, et Belgica était violée dans son intimité par l'intrusion de l'équipe de tournage», observe-t-il.

Mais la comparaison s'arrête là. Car contrairement à son personnage, Belgica «est une femme très lucide, éveillée, cultivée, très maline et très critique», assure-t-il.