Après avoir séduit pratiquement tous les enfants du monde avec Kirikou et Azur et Asmar, le sorcier de l’animation à la française, Michel Ocelot, passe au relief pour raconter le voyage imaginaire de deux enfants dans Les Contes de la nuit.

Son film est le seul français en compétition à la Berlinale, ce qu’il prend «comme un énorme compliment». Il annonce un Kirikou 3 en relief, tout en mettant en garde: «La 3D, ce n’est qu’un nouveau tournevis. Il faut d’abord qu’on nous raconte une histoire qui nous intéresse».

Q: Pourquoi la 3D aujourd’hui et qu’apporte le relief à votre travail ?

R: La 3D ajoute un petit charme en plus, une petite magie innocente, comme être vraiment sous une pluie d’étoiles et avoir le temps de les regarder tomber.

Mais le film marche aussi en 2D parce que je tiens à ce qu’il puisse être diffusé dans les deux formats pour les gens qui n’aiment pas porter des lunettes.

Et quand on parle de mon style traditionnel, c’est juste qu’avant j’étais pauvre! Je cherchais à faire des films malgré tout et il se trouve que le théâtre d’ombre pratiqué image par image est la façon la moins chère d’y parvenir. D’ailleurs j’y reviendrai.

Q: Vous auriez fait Kirikou en 3D ?

R: Justement, j’en fais un troisième (après Kirikou et la Sorcière et Kirikou et les bêtes sauvages, ndlr) en relief: ce sera Kirikou et les hommes et les femmes qui sortira pour Noël 2012. Mais c’est une demande commerciale: aujourd’hui, on trouve de l’argent si on fait de la 3D.

Mes personnages seront en relief mais ils garderont leur apparence dessinée et coloriée, toute simple. Et les décors, comme pour «Les Contes de la nuit», seront de jolis découpages, étalés sur la scène. Je vais le faire avec le studio Mac Guff (les Français qui ont animé les Contes de la Nuit) et Universal: ils sont très contents, parce qu’ils ont beaucoup bataillé pour l’avoir. Mais ce sera aussi visible en 2D, bien sûr.

Q: La 3D, c’est la quête du Graal, une mode ou une révolution ?

R: C’est surtout la quête du spectateur... la 3D est là pour attirer des gens dans les salles obscures, parce qu’on a beaucoup de mal à survivre avec la concurrence de la télé, des DVD et le piratage. Le relief a été inventé pour ça. Mais ce n’est pas une révolution, ça ne change pas grand chose: on est surpris au début, agréablement je l’espère, et rapidement on oublie le relief.

C’est juste un tournevis en plus: il faut le connaître, mais ce n’est pas ça qui fait le film. Il faut d’abord qu’on nous raconte une histoire qui nous intéresse.

En France, nous avons d’excellentes écoles d’animation, qui forment des techniciens et des artistes très habiles. Mais on a besoin d’auteurs, et qu’ils nous offrent leurs tripes, et qu’on y croie.

Propos recueillis par Anne Chaon.