Étudiant, Adrien Morot avait deux objectifs : voir un de ses monstres orner la couverture du magazine d’horreur Fangoria et être maquilleur d’effets spéciaux à Los Angeles à l’âge de 24 ans. Non seulement il a atteint ses deux buts, mais il est aussi en nomination pour l’Oscar du meilleur maquillage.

Le matin du 25 janvier dernier, jour de l’annonce des mises en nomination aux Oscars, le maquilleur Adrien Morot a reçu un courriel du comédien Paul Giamatti, rencontré sur le plateau du film Le monde de Barney.

«Dans son courriel, Paul (qui est devenu un ami) me demandait: «Et puis, est-ce que tu es en nomination?» J’essayais de trouver l’information sur l’internet, mais je ne suis pas habile avec les moteurs de recherche», raconte-t-il.

Pendant qu’il farfouillait sur la Toile, les courriels de félicitations sont arrivés: 1, 2, 3, 5 10, 30 courriels. «J’ai su que j’étais finaliste», dit Morot, rencontré dans son atelier, rue de Gaspé, à Montréal.

Avec la carrière qu’il a, Adrien Morot pourrait «se péter les bretelles». Étaler ses fréquentations avec les grands du septième art. Mais il préfère parler de maquillage et de ses idoles dans le domaine. Dont Rick Baker, autre finaliste.

«Rick Baker, c’est celui que la prophétie annonçait depuis des siècles, dit-il. C’est un talent singulier. C’est lui qui a fait que le maquillage d’effets spéciaux a explosé. Un talent à part. Il est le premier à avoir remporté un Oscar du meilleur maquillage avec le film An American Werewolf in London. Finaliste 11 fois en 20 ans, il a remporté six fois l’Oscar.»

Un tour de force
Adrien Morot est néanmoins en excellente position cette année, puisqu’il n’y a que trois finalistes. Outre Baker (pour The Wolfman) et lui (pour Le monde de Barney), l’équipe du film The Way Back de Peter Weir est dans la course.

Tout le monde s’accorde pour dire que Morot et son équipe ont réussi un tour de force en faisant vieillir Giamatti (Barney Panofsky) et les personnages secondaires du Monde de Barney sur une période de 35 ans.

«Nous avions six personnages à faire vieillir, dit Morot. Je devais m’assurer de la continuité et de la vraisemblance de tous les vieillissements. Pour un film de cette envergure, nous étions six ou sept personnes. C’était peu. Dans une grosse production américaine, il y aurait eu facilement le double ou le triple de personnel.»

Les personnages, c’est son truc. «J’aime beaucoup faire des maquillages de personnages, des vieillissements, dit-il. J’aime les choses qui sont relativement subtiles. Lorsque je dessine, je fais beaucoup de portraits. Par contre, j’ai la chance de faire des choses hyper trippantes comme un film de loups-garous ou un long métrage où des gens se font couper la tête... La variété est plaisante.»

Dans son atelier peuplé de têtes grotesques, de masques de loups-garous, de cadavres mutilés et de tablettes croulant sous des tonnes de matériel et d’accessoires, bien des personnages de films sont nés.

Et il y aussi quelques photos illustrant la vie de cet amoureux des effets spéciaux dont le bonheur de créer remonte à son enfance. On le voit, sur l’une d’elles, créer un masque alors qu’il est encore un gamin.

Il devait avoir un plaisir fou à passer l’Halloween, suggère-t-on. «Ce n’est pas tant à l’Halloween que dans la vie de tous les jours, répond-il. Adolescent, je faisais des maquillages avec des mains coupées, des doigts arrachés, des parties de cerveau à l’air libre. Je me mettais plein de sang et j’entrais dans un dépanneur en poussant des cris d’agonie et en demandant des pansements. Vraiment, c’était n’importe quoi et irresponsable (rires). Je suis quelqu’un de relativement réservé et timide et je crois que c’était un exutoire pour moi.»

Parents, retenez ceci: si vos enfants font des folies, réfléchissez avant de leur servir une punition. Leurs frasques les mèneront peut-être à la cérémonie des Oscars.

Adrien Morot a travaillé à...

Angle mort
(2011)

Lance et compte (2010)

Night at the Museum (2006)

Bon Cop, Bad Cop (2006)

C.R.A.Z.Y. (2005)

The Day After Tomorrow (2004)

Maelström (2000)

Et des dizaines d’autres films et séries télévisées.