Ses dernières années ont été marquées par la maladie d'Alzheimer, à tel point qu'elle ne savait plus rien de sa vie ni de sa carrière. La comédienne française Annie Girardot s'est éteinte hier à l'hôpital Lariboisière de Paris, à l'âge de 79 ans.

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Dès l'annonce de sa mort, les témoignages d'affection se sont multipliés. Le réalisateur Claude Lelouch, qui l'a dirigée dans ses longs métrages Vivre pour vivre, Les Misérables, Il y a des jours... et des lunes et Partir, revenir, a déclaré qu'elle était «peut-être la plus grande actrice du cinéma français d'après-guerre».

Même élan d'estime chez le réalisateur Betrand Blier qui avait dirigé Mme Girardot dans Merci la vie en 1990. Décrivant l'actrice comme «drôle et douloureuse à la fois», M. Blier a rappelé la fragilité de cette femme qui a essuyé de graves échecs. «Elle était pleine d'émotion et de souffrance. Elle craquait facilement, comme sur la scène des Césars.»

Les cinéphiles qui s'intéressent à cette cérémonie se souviendront du discours de la comédienne lorsqu'elle a reçu son deuxième de trois Césars pour le film Les Misérables, en 1996. Émue aux larmes par cette récompense qui arrivait après un passage à vide dans sa carrière, elle a lancé: «Le cinéma m'a manqué. Follement, éperdument, douloureusement.»

Annie Girardot est née le 25 octobre 1931 à Paris. Après avoir fait des études pour devenir infirmière, elle entre au Conservatoire. Dès le début des année 50, elle amorce une prolifique carrière qui la mènera tant au cinéma qu'à la télévision et au théâtre. Elle tournera dans une centaine de films, remportera de nombreux prix et enregistrera même quelques disques.

Outre Lelouch et Blier, elle tourne avec Alain Delon dans Rocco et ses frères de Luchino Visconti, dans Mourir d'aimer d'André Cayatte, dans La zizanie de Louis de Funès. Son rôle de docteur Françoise Gailland dans le film éponyme de Jean-Louis Bertucelli lui vaut son premier César en 1977. En 2002, elle décroche un troisième César pour son rôle dans La pianiste de Michael Haneke.

Parallèlement à sa vie publique, Annie Girardot a connu une vie personnelle mouvementée et souvent tragique, minée par des problèmes financiers, des troubles de santé et par les problèmes de drogue de sa fille.

Passage au Québec

En 1998, Annie Girardot a passé quelques semaines au Québec pour le tournage du film L'âge de braise de Jacques Leduc. Dans ce film où jouaient France Castel et Pascale Bussières, Mme Girardot interprétait Caroline Bonhomme, une femme se préparant à une mort imminente.

«J'en garde un excellent souvenir. C'était une excellente compagne de travail, indique Jacques Leduc. On sentait sa force de caractère dans tous ses rôles. Elle avait cette façon de dire «Exactly» en anglais en appuyant sur chaque syllabe et je dis encore cette expression.»

«Elle me disait : «Copinette, copinette, viens, on va aller fumer une petite clope», se souvient France Castel en riant. Dans le film de Jacques, nous jouions deux grandes amies. Mais je sentais chez elle certaines difficultés. J'ai le sentiment que les premiers signes de l'Alzheimer s'installaient. Elle était très affectueuse avec nous. Elle jouait d'intuition, d'instinct.»

Vice-présidente aux communications chez Alliance, Annie Tremblay s'occupait de Mme Girardot durant le tournage. «J'ai ce souvenir, très particulier que même si elle était Française, elle ne buvait jamais de vin. Que de la bière, dit-elle. C'était une personne qui ne vivait que pour jouer et tourner.»

La comédienne Janine Sutto l'a vu en solo sur les planches, dans la pièce Madame Marguerite à Paris. «Elle était très particulière, spéciale. Je l'aimais énormément, dit Mme Sutto. Elle était tellement vrai dans ses films.»

En 2006, le fait que la comédienne souffrait de l'Alzheimer a été rendu public. En 2008, le documentariste Nicolas Baulieu a tourné un film sur elle alors qu'elle était très malade et avait intitulé celui-ci Ainsi va la vie. «Aujourd'hui, Annie ne sait plus rien d'Annie Girardot», concluait-il.

- Avec AFP et Le Monde