Le milieu du travail est une jungle. Et, dans la jungle qu'explore Horrible Bosses de Seth Gordon, les employés servent de proie aux patrons. Expédition à haut risque en compagnie de ceux qui ont travaillé à cette comédie du travail.

«J'ai eu tellement de mauvais patrons que j'ai commencé à me demander si je n'étais pas un mauvais employé», s'est souvenu le scénariste Michael Markovitz lors d'une conférence de presse tenue à Los Angeles. C'est quand il s'est rendu compte que le problème n'était pas à son niveau, mais plus haut dans l'échelle hiérarchique qu'il s'est mis à l'écriture d'Horrible Bosses.

Sur un air de «Et si...», il a imaginé trois employés qui, craquant sous la pression exercée par leurs supérieurs, en viennent à opter pour la solution ultime: éliminer la souffrance à sa source, donc tuer leurs patrons.

Trois types ordinaires qui décident de passer à l'acte ultime, c'est plausible? «En fait, notre plus grand défi a été de rendre crédible le passage de la pulsion née sous l'influence de l'alcool à la mise en oeuvre du plan de tuer quelqu'un», admet Jonathan Goldstein, qui a aussi travaillé au scénario du film en compagnie de son partenaire d'écriture, John Francis Daley.

Lequel explique que ce passage se fait grâce à l'amour qu'un travailleur porte à l'entreprise qui l'emploie: «Kurt a le meilleur patron du monde. C'est d'ailleurs pour ça qu'on l'a fait mourir tout de suite. L'entreprise tombe ensuite entre les mains de l'héritier, un homme incompétent et malhonnête.» Plutôt que de voir l'entreprise chérie «mourir», Kurt n'hésite donc pas à se débarrasser de Junior. Et à convaincre ses copains d'entrer dans le jeu.

Bref, c'est la jungle. Et qui dit jungle dit prédateurs et proies. Voici les uns et les autres.

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Le prédateur: Dr Julia (Jennifer Aniston)

Elle est dentiste. Elle possède un appétit sexuel aussi impressionnant que ses décolletés. «C'est la première fois qu'on me propose ce genre de rôle et j'ai accepté sans hésiter», a affirmé celle qui a toutefois senti le besoin de se transformer pour pouvoir se glisser dans la peau de Dr Julia. D'où sa chevelure sombre. «On a appelé ça le Hairgate: le studio refusait que je porte une perruque, sous prétexte que les gens ne me reconnaîtraient pas. J'ai répondu: «Voyons donc! Mon nom figure au générique, ils vont savoir que c'est moi!» Une chose est sûre, je ne pouvais pas dire ces mots sans changer mon apparence. À partir de là, je ne me suis jamais sentie aussi libre.»

Sa proie: Dale (Charlie Day)

Il est hygiéniste dentaire. Le rêve de sa vie: se marier. Il a trouvé la fille parfaite pour cela. «Un journaliste m'a demandé: «Quel est le problème de Dale? Je coucherais avec le Dr Julia n'importe quand!» J'ai répondu: «Ah oui? Tu es marié?» Il l'était. Alors, je lui ai demandé s'il écrirait ce qu'il venait de me dire dans son article. C'est des conneries, tout ça. Et surtout, ça ne va pas avec la personnalité de Dale, qui est un romantique fini.»

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Le prédateur: Pellit Jr. (Colin Farrell)

Il est malhonnête, drogué, incapable... et vient d'hériter de l'entreprise de son père - qu'il veut faire rouler pour le bien de sa propre personne. «En voyant In Bruges, j'ai constaté à quel point Colin pouvait être drôle, raconte Seth Gordon. Je l'ai rencontré pour le rôle de Pellit Jr. et il a tout de suite été question du look de ce personnage veule: il fallait qu'il ait du ventre et qu'il se peigne sur le côté pour cacher sa calvitie. Colin a été emballé et a poussé tout ça encore plus loin.»

Sa proie : Kurt (Jason Sudeikis)

Il aime l'entreprise pour laquelle il travaille. Après tout, son patron est, pour lui, une figure paternelle. Son ancien patron. Pas le nouveau. Les affrontements entre les deux hommes sont assez tordus. «Et ils ne sont pas improvisés, assure le comédien. Du moins, pas dans le sens où on fait perdre temps et argent à tout le monde parce qu'on ne sait pas ce qu'on doit faire. Au début de la journée, nous discutions avec Seth, donnions des idées, placions les choses.» Et après, silence, on tourne!

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Le prédateur: Harken (Kevin Spacey)

À la maison, il est maladivement jaloux. Au boulot, c'est un psychopathe manipulateur. «Un maître de la torture psychologique, résume Seth Gordon. Nous avons imaginé un genre de sadique passif agressif que tout le monde peut reconnaître - parce qu'il en existe plusieurs formes dans la réalité.»

Sa proie : Nick (Jason Bateman)

Il fait des journées de douze heures au bureau, mais se fait réprimander s'il arrive deux minutes en retard. Son patron se sert d'un manquement du genre comme prétexte pour lui refuser une promotion. Mais, dans les faits, il n'a jamais eu l'intention de la lui accorder. Jason Bateman connaît ce personnage de bon gars zélé mais naïf: «Vous êtes embauché pour la dernière chose que vous avez faite. Et je n'ai pas encore eu la chance de me faire offrir des rôles complètement différents de ceux que je joue traditionnellement, reconnaît-il. Ça viendra peut-être un jour...»