Le nombre de films étrangers tournés au Congo se compte sur les doigts de la main. Les tracasseries logistiques et bureaucratiques en constituent sans doute les principales raisons.

Ainsi, pour le tournage du film Rebelle, la majorité des scènes ont été tournées en extérieurs, dans la périphérie de la capitale Kinshasa. Pour s'y rendre, les voitures et camions de la production devaient emprunter de grandes artères où la circulation était très dense, ou ralentie par les innombrables chantiers de construction. Et lorsque ces véhicules quittaient les routes asphaltées, c'était pour s'engager dans des sentiers de terre battue à l'aspect lunaire tant ils étaient crevassés.

Sur les lieux de tournage, il fallait faire avec les aléas des services publics, comme le fait remarquer Éric Poirier, chargé de la création des costumes. « Il nous est arrivé de manquer d'électricité, dit-il. Or, sans cela, la couturière ne peut pas faire les costumes. Sur un des plateaux, nous avons manqué d'eau durant trois jours! Il a fallu organiser tout un système pour nous approvisionner.»

Pour les scènes de combat, la production a importé 600 kilos d'armes et 800 kilos de munitions, toutes démilitarisées, ce qui a requis près de deux mois de travail.

Tout aussi ardues furent les démarches en vue de filmer les scènes de bataille. Comme il y avait beaucoup de bruits de mitraillettes et même une explosion, la production a multiplié les avertissements dans les médias pour ne pas ameuter la population.

Parlementer

Durant les années Mobutu, prendre des images dans la rue relevait de l'exploit et pouvait vous attirer de graves ennuis. Puis, le pays a été plongé dans une longue guerre.

«Longtemps, le pays a été réticent à l'image. Il en reste des vestiges. C'est encore un périple que d'obtenir des autorisations», observe Riva Kalimazi, producteur et acteur qui, avec son partenaire Georges Ngalula Abranches, a fondé la compagnie RG&Créatifs Associés, partenaire de la québécoise Item 7 dans ce projet.

Des démarches auprès de plusieurs ministères (Communications, Culture, Défense, etc.) ont en effet été nécessaires pour obtenir les autorisations requises.

Négocier

Pour acheter sur place, le Québécois qui débarque doit s'habituer à l'art de la négociation comme l'ont constaté les membres de la production.

Par exemple, évoque le directeur artistique Emmanuel Fréchette, nous voulions installer de vieux seaux usés dans le camp des rebelles. Au Québec, nous aurions acheté des sceaux neufs et les aurions fait patiner. À Kinshasa, nous en avons acheté pour ensuite les échanger contre de très vieux sceaux au marché. Or, il a fallu négocier avec une des femmes qui voulaient deux sceaux neufs pour sa vieille chaudière!»

Assistant-réalisateur se décrivant comme un «fou de l'Afrique», Pierre Magny a accueilli le producteur Pierre Even en lui disant ceci: «L'Afrique est un chaos. Il faut déconstruire ce chaos et y mettre une orfèvrerie de montre suisse.»

Dans le cas de Rebelle, Pierre Magny a conseillé 10 semaines de préparation (préproduction) pour six semaines de tournage. Sage conseil puisque, malgré toutes les embûches, le film sera bouclé dans les temps.