Pour les deux ou trois prochains jours, Philippe Falardeau sera un homme soulagé. Jusqu’à ce que la nervosité le rattrape.

Car il saura le 24 janvier si son film Monsieur Lazhar sera retenu parmi les cinq finalistes pour l’obtention de l’Oscar du meilleur long métrage tourné dans une autre langue que l’anglais.

Mercredi, le cinéaste a vécu de grandes émotions lorsque, au début de l’après-midi, l’Academy of Motion Picture Arts and Science a annoncé que son film faisait partie d’une liste réduite de neuf films toujours dans la course pour cette catégorie. Au départ, 63 pays avaient soumis un film dans l’espoir d’obtenir la précieuse statuette.

Parmi les plus sérieux concurrents toujours présents, on note Pina de Wim Wenders (Allemagne), Une séparation d’Asghar Farhadi (Iran) et Omar m’a tuer de Roschdy Zem (Maroc). Les membres votants n’ont pas retenu Le havre d’Aki Kaurismaki (Finlande), La guerre est déclarée de Valérie Donzelli (France) ou encore Et maintenant on va où? de Nadine Labaki (Liban).

L’annonce est tombée au moment où M. Falardeau se rendait à la conférence de presse pour la création du Prix collégial du cinéma québécois, pour lequel son film est aussi en nomination. Sa présence a créé une certaine effervescence. Alors qu’elle animait la conférence de presse, la réalisatrice et marraine de l’événement, Micheline Lanctôt, a présenté M. Falardeau en disant: «Je salue Philippe, qui est très tendu», ce qui en a fait rire plus d’un.

Plus tard en entrevue, c’est un Philippe Falardeau souriant et soulagé qui a exprimé toute sa joie.

«C’est un soulagement... qui sera passager. Dans deux ou trois jours, je vais recommencer à être nerveux, a-t-il lancé. Au stade où nous en sommes, le potentiel de déception est réel. Je me dis que j’ai un tout petit peu moins de chance que les autres, mais je crois que c’est pour me protéger. À d’autres moments, je me dis pourquoi pas Monsieur Lazhar

Aussi présent pour son film En terrains connus, Stéphane Lafleur pouvait fièrement savourer ce nouvel honneur fait à l’oeuvre de Falardeau, puisqu’il en a assuré le montage. «Je suis très content de toutes les belles choses qui arrivent au film, mais je n’ai pas à subir toute la pression, disait-il avec un petit sourire. Je suis dans les bleachers de l’amitié!»

Film émotif

Monsieur Lazhar raconte la vie d’un immigrant algérien (Fellag) qui prend au pied levé une classe d’enfants du primaire dont l’enseignante s’est enlevé la vie.

En revoyant le parcours de son long métrage, M. Falardeau rappelle que ce fut pour lui un «film émotif» et qu’il ne s’attendait pas à ce qu’il prenne cette trajectoire.

«Je suis allé chercher des choses dans mes tripes, dit-il. À certains moments, ce fut un processus assez épuisant. Lorsque nous l’avons terminé, j’étais très satisfait, mais je croyais que je venais de faire mon film le plus intimiste et qu’il aurait une portée limitée.»

C’est tout le contraire qui est arrivé. Lancé l’été dernier à Locarno en Suisse, Monsieur Lazhar a remporté de nombreux prix dans le monde et a connu un beau succès en salle au Québec. Mardi, il a récolté neuf nominations en vue du gala des prix Génie, qui aura lieu le jeudi 8 mars à Toronto.

Outre les films déjà nommés, les longs métrages en nomination pour le prix de l’Oscar du meilleur film étranger sont: Bullhead de Michael R. Roskam (Belgique), Superclasico de Ole Christian Madsen (Danemark), Footnote de Joseph Cedar (Israël), In Darkness de Agnieszka Holland (Pologne) et Warriors of the Rainbow de Wei Te-shen (Taïwan).

Vendredi, M. Falardeau s’envole pour le festival de Sundance en Utah avec les producteurs Kim McCraw et Luc Déry de micro_scope (les mêmes qu’Incendies de Denis Villeneuve, l’an dernier). C’est là-bas qu’ils sauront si Monsieur Lazhar poursuit sa route vers Hollywood.

La liste préliminaire

-Bullhead de Michael R. Roskam (Belgique)

-Superclásico d'Ole Christian Madsen (Danemark)

-Pina de Wim Wenders (Allemagne)

-Une séparation d'Ashgar Farhadi (Iran)

-Footnote de Joseph Cedar (Israël)

-Omar m'a tuer de Roschdy Zem (Maroc)

-In Darkness d'Agnieszka Holland (Pologne)

-Warriors of the Rainbow: Seediq Bale de Wei Te-sheng (Taïwan)