La Grèce était sous le choc mercredi après le décès «tragique» la veille de son grand cinéaste Théo Angélopoulos, fauché par un motard sur un tournage près d'Athènes, et une controverse s'engageait sur le retard de l'ambulance venue le prendre en charge.

Ses obsèques devraient avoir lieu vendredi après-midi à Athènes.

Le Premier ministre Lucas Papademos a exprimé «sa profonde tristesse» après la mort du réalisateur «qui a témoigné du drame de la Grèce de l'après guerre civile, et a contribué à une compréhension plus profonde de l'histoire contemporaine».

«Le pays perd un de ses grands créateurs, à un moment difficile», a-t-il ajouté dans un communiqué évoquant la carrière du cinéaste humaniste qui a marqué le cinéma européen en faisant émerger un «nouveau cinéma grec» dans les années 70, après la chute du régime des colonels.

Le ministre de la Culture, Pavlos Geroulanos, a lui salué l'oeuvre d'un «des plus importants créateurs du 7e art et ambassadeur de la culture grecque», jugeant que «dans son cas, le terme "d'irremplaçable" prend tout son sens».

Un prix international «Théo Angélopoulos» a été instauré par le ministère et le Festival international cinématographique de Salonique, qui sera décerné tous les ans, au mois de novembre au moment de la tenue du Festival.

Le quotidien Kathimérini mettait en exergue le «nouvel humanisme» porté par le cinéaste, tandis qu'Ethnos déplorait la perte d'un «poète du cinéma». Ta Néa rendait hommage au réalisateur «qui a fait voyager le cinéma grec au bout du monde».

Les radios et télévisions ont ouvert leurs bulletins sur l'annonce de son décès, soulignant le caractère «tragique» de la mort du cinéaste, Palme d'or au Festival de Cannes en 1998 pour son film L'Éternité et un jour.

Adepte de la lenteur et des plans contemplatifs, Théo Angélopoulos a été mortellement blessé, à 76 ans, par un policier qui circulait à moto en dehors de son service sur une voie rapide de la banlieue d'Athènes, en plein tournage de son dernier opus, L'autre mer, consacrée à la crise financière et à la faillite de son pays, et celle de l'Europe.

Les médias alimentaient aussi une controverse sur le délai mis par l'ambulance pour arriver sur les lieux, de 35 à 40 minutes après l'accident, selon les divers témoignages. Les services d'urgence de la capitale ont annoncé l'ouverture d'une enquête interne.

Un représentant syndical des ambulanciers, Ioannis Houssos, a mis en cause sur la radio Flash le manque de personnel et d'entretien du parc ambulancier. Il a affirmé qu'un premier véhicule dépêché par un hôpital du centre-ville était tombé en panne, avant d'être relayé par un deuxième puis finalement une troisième ambulance dénichée dans un hôpital plus proche.

Selon les premiers éléments de l'enquête, la police avait à la demande de l'équipe de tournage coupé la circulation sur une des deux chaussées de la voie où travaillait le cinéaste, mais ce dernier était passé du côté non protégé au moment où a eu lieu l'accident, sans qu'une vitesse excessive de la moto ne soit dans l'immédiat mise en cause.

Les médias restaient de fait prudents sur les circonstances de la collision.

La Grèce affiche une mortalité routière record en Europe, du fait de l'absence de discipline de ses piétons et conducteurs, de l'apathie de la police face aux infractions, et de l'état souvent déplorable du réseau routier.