Passée derrière la caméra «par hasard» pour raconter la guerre en Bosnie dans une fiction projetée à Berlin, Angelina Jolie se rend régulièrement sur le terrain de conflits: l'Afghanistan pourrait être son prochain sujet.

L'actrice américaine, descendue en famille --avec Brad Pitt et leurs six enfants-- pour présenter samedi In the Land of Blood and Honey à la Berlinale, en marge de la compétition, a reçu vendredi quelques journalistes, dont une de l'AFP.

«Je n'ai pas choisi de devenir réalisatrice et je n'ai jamais voulu écrire. J'aurais pu trouver quelqu'un de techniquement plus capable que moi, mais je savais moi à quel point je tenais à l'histoire. Et j'y tenais vraiment, vraiment beaucoup.»

En choisissant pour sa première mise en scène un conte de guerre, un amour complexe au coeur de la Bosnie entre une musulmane et un combattant serbe, elle se fait un devoir de rappeler que dans les années 90, un conflit atroce et cruel, accompagné de viols systématiques et méthodiques contre les Bosniaques, sévissait au coeur de l'Europe - et que le monde regardait ailleurs.

«Je me suis rendue dans la région, mais je n'arrivais pas vraiment à comprendre, alors que c'est à ma génération que c'est arrivé. Aussi j'ai décidé de m'instruire et, plus j'avançais dans mes recherches et mes lectures, plus j'étais en colère et je me sentais contrainte de raconter cette histoire.»

À 36 ans, la vedette oscarisée (Girl Interrupted) est, derrière la façade glamour de son couple, d'abord une femme engagée qui parcourt les terres de conflits depuis plus de dix ans, notamment avec le Haut Commissariat de l'ONU aux réfugiés dont elle est une ambassadrice de bonne volonté ainsi qu'au sein de la Fondation Jolie-Pitt en faveur des populations les plus vulnérables.

Sur le tournage de son film, elle sentait une énorme pression même si elle a «adoré» se retrouver en chef d'orchestre --»Brad dit que c'est parce que je suis la mère de six enfants, on a l'habitude!»-- mais certains moments se sont avérés particulièrement pénibles, d'autant que ses acteurs ont tous été recrutés localement, pour un tournage en serbo-croate (systématiquement doublé d'une prise en anglais).

«C'était dur pour tout le monde, mais surtout pour les acteurs, qui en tant qu'hommes devaient jouer les agresseurs alors que ce sont des pères, des maris adorables. Mais ils savaient qu'ils devaient le faire, au nom des femmes, pour montrer la brutalité dont elles eurent à souffrir.»

Toujours dans cet esprit de témoignage, elle a choisi le Musée de l'Holocauste, à Washington, pour la «première» américaine du film.

«C'était une façon d'attirer l'attention sur cet aspect des génocides (les viols) et pour rappeler que les thèmes du film sont universels. Il me paraît important d'étudier l'histoire des génocides, car ça ne s'est pas produit dans un seul pays à un moment de l'histoire; ça se reproduit régulièrement.»

Angelina Jolie indique qu'elle s'est rendue récemment à Auschwitz: «J'y ai vu tellement de noms serbes sur les murs, parce qu'ils ont combattu les nazis... et plus tard, ils se sont retrouvés être les agresseurs».
«Quand on comprendra vraiment (comment se déroulent) les génocides, on saura aussi comment les arrêter.»

D'ici là, elle espère que son film touchera le plus large public possible: «Je voudrais que les gens le voient et se disent, ç'aurait pu être moi, ce pourrait être ici». Elle regrette déjà qu'en Serbie il soit attaqué «par des gens qui ne l'ont même pas vu».

Elle n'est pas sûre, encore, de revenir un jour derrière la caméra: il lui faudrait trouver une histoire aussi forte à raconter. Une piste cependant: «J'ai commencé à travailler sur quelque chose autour de l'Afghanistan. Je ne l'ai encore montré à personne, mais c'est là-dessus que j'ai envie d'écrire».