L’acteur américain Billy Bob Thornton a présenté lundi en compétition à Berlin son 4e film de réalisateur, Jayne Mansfield’s Car, exploration des relations père-fils puisée au coeur de ses souvenirs intimes.

Longtemps marqué par une réputation sulfureuse - très «sex and drugs and rock’n roll» - l’ancien mari d’Angelina Jolie âgé aujourd’hui de 56 ans s’interroge sur les meurtrissures de la guerre tout en purgeant de vieux comptes d’enfance.

Au cinquième jour de la Berlinale, Jayne Mansfield’s Car, premier et unique film américain en compétition pour l’Ours d’Or, apparaît, à ce jour, comme le plus ambitieux de la sélection, alignant au générique non seulement son réalisateur mais aussi Robert Duvall et John Hurt pour ne citer qu’eux.

En 1969 en Alabama, Jim Caldwell (Duvall) et ses grands enfants s’apprêtent à accueillir la dépouille de leur épouse et mère, partie vivre une seconde vie à Londres, raccompagnée chez elle par sa nouvelle famille, dont son mari anglais Kingsley Bedford (Hurt).

La situation est inconfortable pour tous mais les deux maris vont trouver à se rejoindre sur leurs souvenirs d’anciens combattants (Première et Deuxième Guerre mondiale) et le mépris que leur inspire leurs fils respectifs, pourtant vétérans eux aussi des fronts du Pacifique ou du Vietnam.

Chacun dans son coin et sans jamais l’exprimer vit avec ses blessures, ses terreurs et les fils partagent en outre le sentiment de n’avoir jamais été à la hauteur des espérances paternelles.

«L’essence du film, c’est le romantisme de la tragédie», a indiqué Billy Bob Thornton à la presse: «Dans ces deux familles qui se rencontrent, ces générations qui ont connu la guerre, comment vit-on son traumatisme?»

Son personnage, Skip Caldwell, grièvement brûlé aux commandes de son avion de chasse, cherche désespérément sa place auprès de son père qui collectionne les épaves de voitures accidentées - il va ainsi admirer celle, exposée sur une foire locale, dans laquelle la star Jayne Mansfield trouva la mort.

Ce père de cinéma est directement inspiré par son propre père, a fini par lâcher le réalisateur, «Irlandais violent, vétéran de la Navy en Corée», mort quand il avait 17 ans.
«Quand j’avais quatre ans, il nous emmenait avec mon frère sur des accidents de la route et restait des heures à fumer en regardant les carcasses de voiture».

«J’ai passé ma vie entière à guetter son approbation et celle des hommes plus âgés. Je l’aimais mais il me terrifiait en même temps... Malgré les coups et l’absence de communication, j’ai fini par comprendre qu’il n’avait pas eu les moyens d’exprimer quoi que ce soit».

Cette confidence en résonance directe avec son scénario a été chaleureusement applaudie lors de la conférence de presse.

«C’est un film anti-guerre, mais on n’allait quand même pas l’appeler ''le blues d’après-guerre''», a-t-il plaisanté.

Billy Bob Thornton a trouvé une co-production russe, la première co-production russo-américaine, a-t-il expliqué, car personne ne voulait financer son projet.

«La plupart des films qui sont financés en Amérique sont des films de gladiateurs, des comédies ou des films avec des enfants enfermés dans des chambres d’hôtel...»

«Cette histoire entre des vétérans américains et anglais je l’avais en tête depuis longtemps mais personne n’en voulait... Là, j’ai pu choisir mes acteurs et le montage... Quand je le regarde aujourd’hui, j’ai l’impression que c’est le film que nous voulions faire».