Marseille, la banlieue nord, les barres. Mais si, les barres. Ces grands édifices horizontaux où logent les familles à faible revenu. La vie est dure là-bas. Beaucoup de criminalité et peu de modèles pour en sortir.

Mais il y a Yvan Sorel. Sorte de croisement entre Georges St-Pierre et un excellent professeur à la poigne de fer. Vous devriez le voir avec les jeunes du quartier. Dans son modeste gym, Yvan Sorel enseigne le free fight et les grands principes qui font qu'on devient quelqu'un de bien dans la vie.

Ce personnage fascinant est au coeur de Spartiates, documentaire de Nicolas Wadimoff projeté en clôture des 17es Rencontres internationales du documentaire de Montréal (RIDM).

Comment avez-vous découvert Yvan Sorel?

Un ami commun, le comédien Moussa Maaskri qui jouait dans le film Clandestins que Denis Chouinard et moi avons tourné, me l'a présenté. Yvan est un type incroyable qui fait un boulot fantastique avec les jeunes des quartiers du nord de Marseille qui n'attendent plus rien de la République et se débrouillent avec leurs propres moyens. Et il possède une présence incroyable à la caméra.

Comment Yvan a-t-il trouvé cette vocation d'éducateur?

Il vient lui-même de quartiers durs. C'était un gosse turbulent. Il a appris à se défendre avec ses poings. Son père est polonais et sa mère était algérienne. Cela lui permet d'être à l'aise dans toutes les communautés. Mais, petit, il était le gentil petit Blanc qu'on tapait. Un jour, il est allé se plaindre à son père qui lui a répondu de régler ses histoires lui-même, sinon c'était lui (son père) qui lui donnerait une raclée. Ça lui a ouvert la voie. Mais Yvan a aussi fait des bêtises. À 17 ans, il a choisi le bon chemin et est devenu champion de France de kung fu puis, professeur de sports de combat.

De quoi est fait son intérieur?

Je crois qu'il est extrêmement révolté contre les injustices. Il a sans doute une blessure due à l'absence et la maladie de sa mère qui est décédée. Il se bat chaque jour avec ses démons intérieurs.

Faire des sports violents pour combattre la violence, c'est possible?

L'esprit et la mentalité des arts martiaux nous amènent à nous contrôler, nous gérer. Yvan essaie de transmettre des valeurs considérées dans les sociétés démocratiques modernes comme désuètes et qui ont l'air de clichés: l'honneur, la dignité, etc. Ce sont des choses qu'il transmet très bien aux jeunes.

Quelle place a ce film dans votre oeuvre?

J'ai fait de la fiction et du documentaire. Avec ce film, j'ai l'impression d'avoir réussi à atteindre un mode de cinéma direct qui me plaît. C'est un documentaire où mon sujet a la trajectoire d'un personnage de fiction. Pour moi, cela ouvre de nouvelles perspectives.

Si je continue comme ça, j'ai le sentiment que j'aurai moins besoin de faire de la fiction.

Aujourd'hui, 19h, Université Concordia, théâtre Hall Demain, 18h45, Cinéma Excentris.