Les Rencontres internationales du documentaire de Montréal ne pouvaient choisir meilleur film d'ouverture pour leur 15e anniversaire. The End of Time de Peter Mettler traite admirablement d'une notion universelle et vaste comme l'expérience humaine elle-même, le temps.

Qu'est-ce que le temps? Quand a commencé le temps? Et si le temps n'existait pas? Si ce n'était qu'un mot pour mesurer notre durée et celle du monde qui nous entoure? Si le temps ne passait pas, mais que nous passions dans le temps?

Le documentaire de Peter Mettler, The End of Time (La fin du temps en version française), n'a pas la prétention de répondre à la place des nombreux scientifiques, poètes et philosophes qui ont posé ces questions au cours de l'histoire.

Le film les reprend à la façon d'un cinéaste, parfois philosophe, souvent poète.

«Je ne voulais pas faire un film didactique, explique le documentariste canado-suisse de 54 ans. La première chose que je me suis mis à observer, ce sont les nuages, leur création et leur transformation. Dans plusieurs langues, en français notamment, le temps signifie à la fois une durée et la température.»

The End of Time est le dernier film d'une trilogie entreprise en 1994 avec Picture of Light, qui traitait de transcendance, et Gamblings, Gods and LSD, en 2002, à propos de la mort. Le cinéaste a aussi adapté pour le cinéma en 1991 Les plaques tectoniques de Robert Lepage.

Peter Mettler avoue que son plus récent et ambitieux projet a été le plus difficile à réaliser. Tellement de gens ont parlé et écrit sur le temps. Il s'est lancé dans ce tournage, qui a nécessité deux ans de travail, en se mettant à l'écoute de la nature et des humains qui s'y débattent.

«La façon dont nous prenons en compte le temps m'intéressait davantage, dit-il. Ce concept s'est installé tout simplement au fil du processus de tournage qui s'est déroulé dans plusieurs continents.»

Le documentaire nous montre un homme qui vit à Hawaii dans une maison presque complètement entourée par la lave d'un volcan, toujours en éruption, tout près. Il visite également le gigantesque accélérateur de particules construit par le CERN (Organisation européenne pour la recherche nucléaire) en Suisse, où les physiciens étudient les lois de l'univers.

Plusieurs voix se font entendre sur la bande-son pendant que les images nous montrent des animaux et des phénomènes naturels. Certains passages du film relèvent presque du rêve et du cinéma expérimental. Plusieurs scènes sont à couper le souffle.

«J'ai voulu utiliser le cinéma pour ce qu'il peut offrir, soit une expérience du temps. Il nous donne une perception du temps, souligne Peter Mettler. J'ai construit le film par association d'idées. Il n'y a pas de récit.»

Film de montage

The End of Time est un film de montage qui entremêle adroitement des expériences scientifiques complexes avec des images de la vie qui bat; des entrevues avec un artiste techno de la ville de Detroit et un bouddhiste indien dont les propos sur le temps présent renvoient à la théorie de la relativité d'Albert Einstein.

«Je me suis aperçu qu'on pouvait lire le film de beaucoup plus de manières que je l'imaginais au départ, dit Mettler en rigolant. On y trouve quand même beaucoup d'information, alors que ce n'est pas ce que j'envisageais.»

Le temps joue des tours. Mais en grand maître de cinéma, Peter Mettler évite les pièges de la pensée économique à tout prix ou de la grandiloquence que pourrait suggérer un tel sujet. À l'opposé de l'installation vidéo de l'artiste visuel Christian Marclay, The Clock, qui nous fait vivre presque organiquement le temps en 24 heures, le film de Peter Mettler ne met en vedette aucun cadran, aucune montre.

À la toute fin, on entendra cependant le tic-tac d'une horloge, celle de la cuisine où la mère du cinéaste nous ramène à l'essentiel: «Il faut profiter du temps que nous avons avant qu'il ne passe .»

___________________________________________________________________________

The End of Time ouvre les RIDM ce soir. Il sera présenté vendredi à 17h 30 à la Cinémathèque, avant une rencontre avec le cinéaste. Il sera à l'affiche au Québec le 12 décembre.