Contre vents et traditions, les Français se lancent dans le cinéma de genre. À preuve, le court métrage déjanté Extreme Pinocchio, réalisé par un Québécois et Parisien d'adoption. À moins que ce ne soit le contraire? Énigme.

Pascal Chind revient au pays. Né à Montréal de parents français, il vit et travaille à Paris depuis 17 ans, mais s'amène fièrement à Fantasia avec un conte vraiment pas pour tous sous le bras, Extreme Pinocchio.

Dans ce film fou de 23 minutes dont l'acteur principal mesure 1,23 m, le petit Pinocchio finit en marionnette de bois - plutôt que le contraire -, sa conscience est un rappeur, la fée bleue, un travelo, le chat et le renard, des trafiquants de drogue et Geppetto, un pédophile!

«C'était ça le défi, note le cinéaste Pascal Chind. Je voulais amener les gens à rire et à réagir à un sujet aussi complexe et horrible, mais en faisant appel à l'humour noir.»

À contre-courant

Dans Extreme Pinocchio, on nage à contre-courant, fort loin du conte de Collodi. La baleine est un camion d'ordures, on se shoote de la cocaïne avec un revolver, mais la violence n'est jamais montrée.

«J'aime pas quand ça devient insoutenable, quand c'est dégueulasse, dit le cinéaste. Quand ça suinte et que c'est sale dans le décor, oui, mais pas plus. J'aime l'idée de provoquer tout en divertissant.»

On rit ferme et gras dans ce conte acide, tout à fait «fantasianesque». Un peu comme le parcours de Pascal Chind. Cet ancien journaliste a travaillé avec Jean-Luc «ç'a pas de bon sens» Mongrain avant d'aboutir, à 28 ans, à Canal+.

«Comme journaliste, dit-il, je ne voulais rien savoir de la fiction. À Canal+, on m'a forcé à faire des fictions humoristiques vulgaires, gore et sexistes... Et ils ont adoré!»

Puis sont venus la pub, les clips - dont un avec notre chouchou francofolle Zaz - et les courts métrages.

Son film Coupé court, une histoire d'amour tranchante entre un personnage de petite taille - le fabuleux Christophe Fluder qui joue aussi Pinocchio -, et une blonde cruelle a été diffusé 550 fois en France sur différentes chaînes et dans divers contextes.

En ce moment, Pascal Chind écrit son premier long, un film de science-fiction. Mais il ne faut pas croire que la partie est jouée. Le cinéma de genre français tarde à décoller.

Projets

Son producteur, Olivier Lamy, grand fan de cinéma de genre, est à mettre sur pied un studio. Il prépare aussi avec le cinéaste une série de contes extrêmes, du genre Extreme Blanche-Neige et Petite Sirène.

«Je voudrais aider au maximum les films de genre en France, explique le jeune producteur. Les gens ont du mal à sortir leur projet. Avec le sociofinancement, on a vu qu'il y avait un public pour Pinocchio et on a pu récupérer le reste de l'argent auprès d'investisseurs privés.»

Eh oui, Pascal Chind l'avoue, il a parfois envie de revenir pour de bon. La montée de la droite et la situation économique en France l'effraient davantage que son Geppetto dans le film.

«Tout est long en France, ajoute-t-il. Le monde du cinéma a de la difficulté à laisser la Nouvelle Vague derrière, malheureusement. Dès qu'on veut faire quelque chose de différent, les gens n'osent pas, ça devient presque impossible d'avancer.»

Impossible n'est pas québécois, comme chacun sait.

_______________________________________________________________________________

Extreme Pinocchio est présenté en première partie d'Angry Video Game Nerd: The Movie le 27 juillet, 22h, au Théâtre Concordia Hall et le 6 août, 15h, à la salle J.A. De Sève de l'Université Concordia.