Le rêve, dit la cinéaste Sophie Goyette, fait partie de ces choses universelles qui nous unissent. Ces choses qui sont en chacun de nous, font partie de nos vies et parfois les influencent.

«C'est comme une autoroute que nous prenons tous, dit-elle. Peu importe où nous sommes rendus dans nos vies, nous avons, par le rêve, un univers nous étant alloué, chaque soir, qu'on le veuille ou non, et qu'on peut explorer de différentes façons.»

Or, au petit matin, ces rêves peuvent bêtement éclater comme un phylactère au-dessus de la tête d'un personnage de bande dessinée ou, a contrario, servir de nourriture vers la concrétisation de vieux rêves, éveillés ceux-là, dont la réalisation est éternellement repoussée.

C'est la deuxième option qui attend justement Éliane, Romes et Pablo, les trois personnages de Mes nuits feront écho, premier long métrage de la scénariste et réalisatrice que présente le Festival du nouveau cinéma.

Trois personnages, de trois générations différentes, mais dont la trajectoire de vie prendra, un jour, ou plutôt une nuit, une courbure nouvelle, voire nécessaire. Trois personnages dont les vies vont aussi se télescoper dans une douceur infinie.

En somme, leurs nuits se font écho.

«Ces quatre mots ne sont jamais dits dans le film, mais à la finale, ils font à mon avis du sens, dit la cinéaste. J'ai construit trois univers, trois mondes qui basculent l'un dans l'autre comme un aller sans retour, avec un très grand retour à la fin.»

À la nuit et au rêve comme vecteurs de changement, Sophie Goyette ajoute la notion de voyage (l'histoire se décline dans trois pays). On ne parle pas ici de loisir. Plutôt de changements de décor qui alimentent des voyages intérieurs.

«Le voyage et le cinéma sont deux façons de s'échapper de nous-mêmes, mais qui peuvent en fait nous confronter. On peut être au bout du monde et se poser de grandes questions existentielles comme on peut croire qu'on va s'évader dans un film qui va, finalement, nous rattraper dans notre vie sans qu'on s'y attende.»

Mélancolie

D'aucuns, chez les créateurs, au cinéma comme dans d'autres formes d'art, adoptent un langage plus frontal, plus rude, pour évoquer des virages existentiels. Pas Sophie Goyette. Du moins, pas ici. Son approche est plutôt contemplative, méditative. Gens de peu de mots, les personnages du film sont campés dans des décors extrêmement dépouillés et propices à l'introspection.

L'univers de Sophie Goyette, imprégné de naturalisme, nous rappelle ceux de Maxime Giroux et, plus encore, de François Delisle. «Des collègues et amis, dit-elle. Ce sont des personnes que j'affectionne beaucoup. J'ai toujours hâte de voir leur prochain film. Mais il n'y a pas d'influence pour ce film-là.»

On lui demande de nommer des réalisateurs qui lui sont chers et elle répond Krzysztof Kieslowski (Le décalogueTrois couleurs: Bleu, Blanc et Rouge) et Jean-Claude Lauzon, surtout pour Un zoo la nuit.

«Un film qui me touche en plein coeur», dit-elle.

Et un film qui, ô surprise, parle aussi de la nuit...

À l'image de ses deux courts métrages précédents, La ronde et Le futur procheMes nuits feront écho distille une certaine mélancolie. Un sentiment qui se décline aussi à travers deux autres éléments récurrents dans les trois oeuvres: des pièces en piano solo et l'annonce de la mort d'une personne très proche. Cette mélancolie est-elle le reflet de la personnalité de l'auteure?

«Je peux être mélancolique par moments. Je suis énormément bien dans les silences, reconnaît-elle. Mais j'ai des amis qui me disent assez drôle. Et si je fais d'autres films, cet aspect va déteindre de plus en plus.»

Parlant de la suite des choses, la cinéaste, qui aime bien travailler sur plusieurs projets à la fois, est toujours en développement d'un film intitulé Les lauréats avec la maison de production micro_scope (IncendiesMonsieur Lazhar).

«Le projet traite de l'importance de l'art dans nos vies et, en parallèle, de la rédemption par rapport à tout ce qu'il y a de plus sombre en nous.»

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Ce soir, à 21 h, ainsi que le 13 octobre, à 14 h 45, au Cinéma du Parc (salle 1).

photo fournie par le FNC

Mes nuits feront écho, de Sophie Goyette.