Notre envoyé spécial sur la Croisette fait le compte rendu des dernières nouvelles du Festival de Cannes.

Rendez-vous avec John Travolta

Présent à Cannes pour accompagner Gotti, un film de Kevin Connolly présenté en séance spéciale, John Travolta a aussi souligné le 40e anniversaire de la sortie de Grease, projeté hier soir au Cinéma de la plage pour l'occasion, et il s'est également prêté au jeu de la leçon de cinéma. Cheveux poivre et sel, barbe grisonnante, l'acteur âgé de 64 ans a rappelé à quel point l'adaptation de Grease au cinéma constituait un grand défi, notamment parce qu'à l'époque, le spectacle était l'un des plus populaires de Broadway. «Saturday Night Fever et Grease ont défini ma carrière, a-t-il dit. Grease est régulièrement découvert par de nouvelles générations. Je me souviens que Benicio Del Toro est venu me voir un jour en me racontant qu'il avait dû regarder ce film une quinzaine de fois quand il était ado. Et qu'il était à l'origine de son désir de devenir acteur!»

La carrière de John Travolta est aussi intimement liée au Festival de Cannes. En 1994, un «petit film» intitulé Pulp Fiction a carrément relancé sa carrière après plusieurs années creuses. «Personne n'aurait pu prévoir l'impact que ce film a eu. Pulp Fiction a changé l'histoire du cinéma, et la mienne aussi. Quentin Tarantino a exploré des territoires inédits, autant pour les réalisateurs que pour les acteurs. Personnellement, je m'attendais à ce que ce film ait le même genre de carrière que Reservoir Dogs. Il était impossible d'imaginer ce qui est survenu avec ce film!»

Burning (en compétition)

Huit ans après le très beau Poetry, qui lui avait valu le Prix du scénario, Lee Chang-dong propose l'un des films les plus fascinants de cette compétition. Adapté d'une nouvelle d'Haruki Murakami intitulée Les granges brûléesBurning suit le parcours d'un jeune homme (Yoo Ah-in) qui tombe amoureux d'une fille (Jeon Jong-seo) qui, elle, s'attache à son tour à un nouvel ami (Steven Yeun), un jeune homme mystérieux, très riche, mais dont personne ne sait d'où provient la fortune. Empruntant son style contemplatif habituel (certaines images sont sublimes), le cinéaste coréen réussit l'exploit de créer un vrai suspense à partir d'une histoire où, en apparence, il ne se passe rien. Pendant les 149 minutes que dure ce film, Lee Chang-dong trouve le moyen de retenir le spectateur à son histoire, un peu comme s'il aiguisait sa patience au départ pour mieux le gagner à l'usure. À la séance destinée à la presse, Burning fut l'un des films les plus chaleureusement accueillis de cette compétition.

Photo fournie par le Festival de Cannes

Jeon Jong-seo dans Burning de Lee Chang-dong

Under the Silver Lake (en compétition)

David Robert Mitchell est l'un des deux cinéastes américains - l'autre étant Spike Lee - en lice pour la Palme d'or cette année. Très remarqué il y a quatre ans grâce à It Follows, un film d'horreur présenté à Un certain regard, le réalisateur nous propose cette fois un projet plus ambitieux, très attendu des festivaliers. Under the Silver Lake est un film noir éclaté et étrange - bonjour, David Lynch - qui, hélas, s'éparpille, sans jamais véritablement prendre ancrage. Voilà le genre de film qui regorge de bonnes idées (une scène avec un compositeur prétendant avoir écrit tous les tubes depuis trois générations sera très remarquée), mais celles-ci ne forment pas vraiment un ensemble cohérent. On aura ainsi du mal à souscrire à cette histoire d'un homme en mal de notoriété (Andrew Garfield, excellent) qui devient obsédé par la disparition d'une voisine, au point où il n'hésitera pas à mener une enquête qui l'entraînera dans les bas-fonds de Los Angeles. Sorte de L.A. Confidential trash, dopé à la mythologie du cinéma, Under the Silver Lake fait partie de ces productions qui, à force de trop vouloir en faire, en viennent à perdre leur direction. Déception.

Photo fournie par le Festival de Cannes

Andrew Garfield dans Under the Silver Lake, de David Robert Mitchell