Lily-Rose Depp, fille de Vanessa Paradis et Johnny Depp, joue les débutantes surdouées dans The Dancer, film sensible où elle incarne un second rôle, celui de la jeune prodige aux pieds nus, l'Américaine Isadora Duncan.

Présenté vendredi à Cannes dans la sélection Un certain regard, ce premier film de la Française Stéphanie Di Giusto, a été longuement applaudi en projection de presse.

Il raconte surtout la destinée d'une autre danseuse, Loïe Fuller, créatrice de la danse serpentine et icône de la Belle époque qui ne s'est jamais remise de sa rencontre avec Isadora Duncan.

«Après sa rencontre avec Isadora dont elle était tombée secrètement amoureuse, Loïe Fuller ne pourra plus danser. Pour elle, Isadora incarnait la beauté, la grâce, la jeunesse et le génie, et finalement ce qu'elle ne pourra jamais être. Avide de gloire, Isadora a précipité la chute de Loïe Fuller», a raconté la réalisatrice à l'AFP.

Pour sa première participation dans un premier film français, Lily-Rose Depp, 16 ans, livre avec un jeu très juste une étonnante composition d'Isadora Duncan, personnalité narcissique et vénéneuse qui s'était fait construire un temple à sa gloire en Grèce.

«Pour incarner Isadora, je cherchais une Américaine de 16 ans. Lily-Rose a été séduite par ce second rôle. Elle a passé des essais devant la caméra, mais aussi avec une chorégraphe pour interpréter une danseuse classique», a raconté Stéphanie Di Giusto.

«Lily-Rose est surdouée. Elle m'a bluffée. Elle prend immédiatement le cadre, comme on dit dans le cinéma. C'est ce qu'on appelle une star, une surdouée: elle a été juste tout de suite, impressionnante. En plus, elle est très à l'aise avec son corps, prête à l'abandon. Elle n'a peur de rien. Elle veut être actrice, et elle est faite pour ça».

Égérie de Chanel, nouvelle coqueluche du cinéma, Lily-Rose a débuté au cinéma en 2014 dans Tusk de Kevin Smith, par une apparition au côté de son père, Johnny Depp. L'adolescente vient aussi de tourner dans Planetarium de la Française Rebecca Zlotowski avec l'actrice Natalie Portman.

Livrant une performance artistique et physique, passant par tous les registres des émotions, la chanteuse et actrice Soko, en tête d'affiche de The Dancer, incarne Loïe Fuller qui a inventé la danse serpentine qu'elle a fait breveter.

L'art oublié de Loïe Fuller

Sous des mètres de voile, les bras prolongés par de longues baguettes de bois, la transformant en fleur ou papillon, cette danseuse a été la star des Folies Bergère, à Paris, dans les années 1900.

«Soko porte le film. Elle a accepté un entrainement de plusieurs semaines pour danser comme Loïe Fuller. Soko n'a jamais été doublée», insiste la réalisatrice. «J'ai voulu réhabiliter l'art oublié de Loïe Fuller en réalisant un film sur le corps, en mouvement permanent.»

Tourné en décors naturels, notamment à l'Opéra de Paris, là où s'est réellement produite pour un soir Loïe Fuller avant de sombrer, The Dancer est une ode à la danse, «pas seulement sur scène, mais aussi dans la vie comme façon d'être», dit Stéphanie Di Giusto qui a également enrôlé Mélanie Thierry, Gaspard Ulliel et François Damiens.

«Loïe Fuller était l'une des danseuses les mieux payées du monde, mais beaucoup d'universitaires ne la considèrent pas comme une danseuse parce qu'elle n'a pas transmis son savoir», souligne la réalisatrice.

Dernière facétie de la vie: Loïe Fuller est enterrée au Père Lachaise. Sa tombe est enfouie dans la végétation quand celle d'Isadora Duncan, à 100 mètres, est magnifiquement entretenue. L'injustice perdure.