«Tout vient à point à qui sait attendre.» Voilà comment Denis Villeneuve a accueilli, jeudi matin, les membres de la presse qui venaient le rencontrer pour discuter de la sélection de son prochain film, Sicario, dans la compétition officielle du Festival de Cannes.

Le Québécois ne le cache pas, il a dû être patient avant de voir un de ses films choisi pour la prestigieuse compétition cannoise, un rêve qu'il chérissait depuis longtemps, mais qu'il avait mis de côté avec le temps.

«C'est un gros cliché, mais Cannes, c'est Cannes. C'est le plus gros, le plus prestigieux festival du monde. Pour moi, c'est un vieux rêve d'aller là-bas. Ça a été un rêve que j'ai chéri pendant longtemps, c'est un rêve qui s'était endormi avec le temps. Je n'y croyais plus vraiment. Ça me touche vraiment de pouvoir participer au festival cette année avec ce film (avec lequel) je ne m'attendais pas à être sélectionné», a-t-il expliqué, précisant qu'il considérait Sicario comme son meilleur film et son plus grand public.

Sicario fera la lutte à 16 autres films pour l'obtention de la très convoitée Palme d'or. Mettant en vedette Emily Blunt, Benicio Del Toro et Josh Brolin, le film raconte l'histoire d'une jeune agente idéaliste du FBI recrutée par les membres d'une escouade tactique gouvernementale et plongée dans l'univers sanglant du trafic international de stupéfiants afin de neutraliser le chef du cartel mexicain.

Le cinéaste a appris sa sélection il y a trois semaines. Les programmateurs du festival auraient eu un coup de coeur spontané pour le long métrage et l'auraient immédiatement inscrit à l'horaire après l'avoir vu une première fois.

«Les festivals de film, pour moi, ont une importance dans la mesure où c'est comme une claque dans le dos pour me dire que j'ai su conserver mon identité, que j'ai réussi à demeurer moi-même, parce que de toute évidence, ce sont des festivals d'auteurs qui mettent en valeur un cinéma d'auteur. Et de réussir à me retrouver à Cannes avec un film que j'ai réalisé à Hollywood, c'est un très beau compliment. C'est aussi, je dirais, rassurant.»

Le problème féminin

Denis Villeneuve est d'autant plus heureux de voir son film se hisser parmi les grands qu'il n'a pas eu la tâche facile quand est venu le temps de trouver du financement pour le tourner.

«C'est un film qui n'était pas évident à financer, au départ, parce que c'est un film très noir. C'est un poème noir, assez violent, et dont le personnage (principal) est une femme. C'est une chose qui m'attriste encore, en tant que cinéaste, que ce ne soit pas facile de faire un film avec un personnage féminin principal, encore aujourd'hui. Je trouve ça toujours assez aberrant et j'espère que notre film, entre autres, va prouver une fois de plus que tout ça est, à mon sens, dépassé et ridicule», a-t-il décrété.

Et ce film, québéco-mexico-hollywoodien, fera en sorte que Denis Villeneuve représentera beaucoup de monde sur la Croisette en mai.

«Qui est-ce que je représente ici? C'est un film tourné à la frontière du Mexique, au Mexique, aux États-Unis, produit par des Américains, tourné par un gars de Montréal. Pour moi, je vais représenter le Québec et le Canada bien sûr, je suis d'ici, et le film parle des États-Unis, mais avec la sensibilité d'un Québécois.»

Le Festival de Cannes se tiendra du 13 au 24 mai. Sicario prendra l'affiche au Québec le 25 septembre.