Pour la première fois, Arielle Dombasle est en sélection officielle à Cannes, hors compétition, en tant que réalisatrice pour Opium, long métrage librement inspiré du journal éponyme que Jean Cocteau a tenu pendant une cure de désintoxication en 1930.

Venue sur la Croisette en 2006 pour Nouvelle chance, film d'Anne Fontaine dont elle partageait l'affiche avec Danielle Darrieux, la chanteuse et comédienne savoure cette invitation comme «un moment merveilleux», ravie de voir «son petit bateau de papier capable de voguer jusqu'à Cannes», en attendant le verdict public: Opium sortira en salles en octobre.

Arielle Dombasle, qui a déjà réalisé deux longs métrages et plusieurs documentaires, rend hommage à Cocteau avec cette «comédie musicale filmée», célébrant les codes esthétiques de l'un de ses maîtres à penser.

«Cocteau donne des clés pour être loin des étangs glacés du conformisme, des conseils à suivre comme une lumière, une étoile brillante dans une société de compromis sans fin. Ses invitations à aller vers l'inspiration, sont essentielles, comme ce principe merveilleux: «Ce que l'on te reproche, fais-le! C'est toi!»», dit à l'AFP Arielle Dombasle.

Aux accents surréalistes, Opium met en scène les amours contrariées de Jean Cocteau et de l'écrivain Raymond Radiguet, l'auteur du Diable au corps, emporté à 19 ans par une fièvre typhoïde mal diagnostiquée.

Le cosmos de Cocteau

L'artiste polymorphe ne s'est jamais remis de cette disparition: «J'ai toujours su que tu m'étais prêté, qu'il fallait te rendre très vite», a-t-il écrit à propos de Radiguet.

Révélée à l'écran en 1978 dans Perceval le Gallois d'Éric Rohmer, la réalisatrice raconte que l'aventure de son troisième film a démarré avec un projet d'album mettant en musiques les poèmes et sonnets que Cocteau a composés de 1929 à 1933. Petit à petit, l'idée d'un film avec le soutien financier de Pierre Bergé, s'est imposée.

Arielle Dombasle qui a coécrit le scénario, a réuni pour Opium, son long métrage le plus maîtrisé, une distribution hétéroclite «d'amis artistes qu'elle admire» dont Marisa Berenson, Julie Depardieu, Philippe Katerine, Valérie Donzelli. Cocteau est campé par Grégoire Colin, et Radiguet par un jeune inconnu prometteur, Samuel Mercer. L'univers du film, renforcé par des incrustations de dessins de Cocteau sur la pellicule, a été mis en scène avec l'aide du styliste Vincent Darré.

Sur une tonalité onirique très appuyée comme un premier hommage à l'univers de Cocteau, Arielle Dombasle met en scène la folie créatrice de l'époque et ses mondanités débridées dont la grande mécène Marie-Laure de Noailles, était l'un des chefs d'orchestre. Pour restituer encore mieux les situations, des scènes ont été tournées dans l'ancien hôtel particulier des Noailles, place des États-Unis, à Paris. On croise Coco Chanel, André Breton, Kisling, Diaghilev, Man Ray...

«Cocteau et Radiguet n'ont jamais cessé de faire des rencontres avec d'autres artistes, des écrivains, des peintes, des musiciens des danseurs, des créateurs de mode. Il fallait ressusciter ce cosmos», explique Arielle Dombasle qui incarne le miroir féminin de Cocteau, comme un voeu sur mesure.