Le 66e Festival de Cannes sera lancé en grande pompe ce soir avec la présentation de The Great Gatsby, une adaptation opulente du roman classique de F. Scott Fitzgerald, signée Baz Luhrmann. Le plus prestigieux festival du cinéma du monde a même dérogé à sa tradition d'ouvrir les festivités avec une primeur mondiale afin de s'assurer la participation de l'équipe du film, Leonardo DiCaprio en tête.

Au cours d'un entretien accordé à La Presse, le réalisateur Baz Luhrmann n'a pas caché le caractère un peu délicat de l'affaire.

«Pour la direction du Festival, le fait que le film soit à l'affiche depuis déjà cinq jours en Amérique du Nord au moment de la soirée d'ouverture constituait un grave problème, reconnaît-il. Mais la présence de Gatsby à Cannes relevait tellement de l'évidence que tous les gens impliqués ont discuté de bonne foi. On a ainsi pu trouver un arrangement satisfaisant.»

Cannes dans le viseur

Dès que le studio Warner a reporté la date de sortie de The Great Gatsby de décembre 2012 à mai 2013 (pour éviter la concurrence avec Django Unchained), le cinéaste s'est mis à rêver d'une sélection cannoise.

«Je suis né professionnellement à Cannes, indique Baz Luhrmann. En 1992, mon premier film Strictly Ballroom venait d'être largué par un distributeur, mais Pierre Rissient, alors conseiller au festival, l'avait vu et l'avait beaucoup aimé. Nous avons été invités à montrer le film dans la section Un certain regard. C'est de là que tout est parti. Sans le Festival de Cannes, je crois que je ne ferais même pas carrière en tant que cinéaste aujourd'hui!»

Outre Strictly Ballroom, Moulin rouge a aussi eu l'honneur d'une présentation cannoise. En 2001, le populaire film musical avait été choisi pour lancer la fête.

«C'était d'ailleurs la toute première année où Thierry Frémaux a fait partie de l'équipe de sélection, fait remarquer Baz Luhrmann. Quand on a proposé Gatsby à Thierry, il y avait déjà deux autres candidats sur les rangs. Il a vu notre film une première fois dans une version pas tout à fait achevée. Il m'a rappelé le lendemain pour me dire qu'il l'avait aimé. Il n'y avait toutefois pas de certitude encore.

«C'est quand Thierry a revu le film, dans une version pratiquement terminée, que le sort en a été jeté. Il y avait quelque chose d'un peu inévitable. Fitzgerald a écrit la partie la plus douloureuse de son roman à Saint-Raphaël, à quelques kilomètres de Cannes à peine. Je crois même que l'emplacement du Palais des festivals ne doit pas être très loin de l'endroit où la femme de Fitzgerald batifolait avec un officier français. Quatre-vingt-huit ans plus tard, voilà que l'adaptation de son plus célèbre roman est projetée en 3D au Théâtre Lumière. Qui l'eût cru?»

À New York d'abord

Même s'il y a ce lien intime entre Fitzgerald et ce coin de la Côte d'Azur, il reste que The Great Gatsby est d'abord et avant tout une histoire new-yorkaise.

«En fait, je dirais que Fitzgerald a probablement écrit l'histoire la plus emblématique de New York, précise le cinéaste. Le roman a été écrit à deux endroits différents, l'un est à 20 minutes de Manhattan et l'autre est à 20 minutes de Cannes. Il aurait toutefois été injuste à mon sens de priver les New-Yorkais d'une grande première de The Great Gatsby, alors que cette histoire leur appartient. Je suis d'ailleurs très reconnaissant à Thierry Frémaux de l'avoir compris.»

Lancé le 10 mai en Amérique du Nord, The Great Gatsby a généré des recettes de 51,2 millions au cours de son premier week-end d'exploitation, dépassant les pronostics les plus optimistes.