L'actrice française Juliette Binoche, venue à la 65e Berlinale pour le film Personne n'attend la nuit, a expliqué à l'AFP aimer «aller vers l'inconnu» en jouant, pour «servir quelque chose de plus grand que soi».

Dans Personne n'attend la nuit (Nobody Wants the Night), film épique en costumes de l'Espagnole Isabel Coixet en compétition à Berlin, elle interprète Josephine, femme de l'explorateur polaire Robert Peary, qui décide de partir à sa rencontre dans des conditions extrêmes.

L'actrice a souvent joué des rôles historiques, du Le Hussard sur le toit de Jean-Paul Rappeneau aux Enfants du siècle de Diane Kurys.

«C'est un hasard. Je ne suis pas en recherche de rôles historiques du tout», dit-elle cependant. «C'est même plutôt plus difficile je trouve, parce qu'il y a une éducation qu'on n'a plus, il y a la contrainte du corset aussi».

«Mais c'est une aventure intéressante, parce que c'est nos aïeux, et que ça fait référence à une partie de nous-mêmes qui est inconsciente», ajoute-t-elle.

Habituée aux héroïnes en quête d'absolu, Juliette Binoche dit être intéressée par les rôles qui demandent un fort engagement physique et émotionnel. «Sinon je n'aurais pas choisi ce film», lance-t-elle.

La comédienne, révélée il y a trente ans dans Rendez-vous d'André Téchiné, explique aussi vouloir varier les films, passant de superproductions à des films d'auteur.

«C'est ce qui se passe de toute façon comme acteur, on s'adapte à des histoires différentes», explique-t-elle. «L'idée c'est de raconter une histoire qui n'est pas soi, d'aller vers l'inconnu».

«Ce qui me passionne dans ce métier, c'est de servir quelque chose qui est plus grand que soi, de se mettre au service de cette vision, de ce rêve, de ce désir».

Reconnaissance

Dans le film d'Isabel Coixet, «c'est l'histoire qui m'a attirée», poursuit-elle. «Le parcours de cette femme montre que quand elle est arrêtée par les éléments, elle est obligée de regarder en elle-même. De ce voyage soi-disant extérieur, elle arrive finalement à un voyage intérieur».

Avec ce nouveau rôle, Juliette Binoche poursuit une carrière internationale entamée avec L'Insoutenable légèreté de l'être de l'Américain Philip Kaufman en 1988.

«Il faut être prêt» pour débuter ce parcours, «mais après c'est la vie qui fait l'alchimie», analyse-t-elle. «Moi quelque part je n'y suis pour rien. J'ai juste dit "oui" au moment où il le fallait».

Déjà auréolée de nombreuses récompenses à travers le monde, dont un Oscar du meilleur second rôle féminin en 1997 pour Le Patient anglais d'Anthony Minghella, Juliette Binoche est aussi en course cette année pour le César de meilleure actrice du cinéma français --qui sera décerné le 20 février-- pour Sils Maria d'Olivier Assayas.

«Les prix, cela représente une reconnaissance de ses pairs» estime-t-elle. «C'est des repères. Ce n'est pas rien, parce que c'est assez abstrait de jouer. Quand on joue, ça passe à l'intérieur de soi, mais c'est impalpable, c'est éphémère».

«Pour moi, il y a aussi une sorte d'ironie du sort, parce qu'enfant, à l'école, je n'étais vraiment pas bonne en classe!», plaisante-t-elle.

Formée au théâtre, Juliette Binoche sera aussi en tournée en Europe à partir du 25 février dans Antigone de Sophocle mis en scène par le Belge Ivo van Hove, à Luxembourg, Londres, Anvers ou Paris.

«Le théâtre, c'est pour moi un lieu nécessaire et qui fait partie de mon premier désir d'être actrice», explique-t-elle. «Je n'ai jamais vraiment l'impression d'en partir».