Catherine Deneuve fut autrefois une Belle de jour, mais dans Elle s'en va d'Emmanuelle Bercot, dernier film de la compétition de la Berlinale, Deneuve est une belle du troisième âge qui fume, qui boit, qui n'a pas vu sa fille depuis des lustres, qui connaît à peine son petit-fils de 9 ans et qui, pour changer le mal de place, part sur un nowhere sur les routes de la France.

Ce film, dernier de la compétition, monte à quatre le nombre de films mettant en vedette des sexagénaires qui arrivent à un tournant de leur vie. Quatre sur dix-neuf, c'est ce qu'on appelle une tendance lourde.

Hier, Catherine Deneuve, la plus belle des sexa, une cohorte qu'elle quittera en octobre prochain pour fêter ses 70 ans, est arrivée au point de presse de la Berlinale dans toute sa blonde splendeur, vêtue d'un trench noir et arborant un air de supplicié qui a hâte que ça finisse.

Le point de presse a mal commencé avec deux mots lâchés comme des bombes par un journaliste ukrainien téméraire et confus, qui voulait parler d'archéologie, au sens d'étude des ruines, et de sénilité.

Un malaise a traversé la salle. La réalisatrice a éclaté d'un grand rire sarcastique. Quant à Catherine Deneuve, elle a répondu du tac au tac: «Tout ce que je retiens de votre question, monsieur, c'est archéologie et sénilité et, si vous le permettez, je passe mon tour.»

Plus tard, une journaliste plus avisée a posé la vraie question. À savoir, le rapport de Deneuve avec le vieillissement, le sujet du film.

«Vieillir, ce n'est pas évident», a répondu Deneuve sur un ton sec avec sa voix rauque de fumeuse. «Ce n'est pas facile pour les femmes et encore moins pour les actrices, mais puisque c'est impossible à contourner, il faut l'apprivoiser.»

Voilà, c'est tout ce que nous avons su. Deneuve, peu généreuse de sa personne, n'a pas épilogué sur l'image un brin poquée qu'elle présente à l'écran, sur ses kilos en trop ni sur ce que ça lui fait de se voir vieillir au grand écran.

Le voeu d'une réalisatrice

Elle dit avoir voulu faire ce film surtout pour travailler avec Emmanuelle Bercot, dont elle admire le travail. La réalisatrice, pour sa part, voulait à tout prix tourner avec Deneuve. Elle a écrit le scénario entièrement en fonction de son égérie, en lui donnant quelques défauts, mais toujours le beau rôle, en s'attardant plus à sa magnifique tignasse qu'à ses rides avant de lui offrir une fin heureuse de comédie romantique.

S'il n'y avait pas eu trois autres films, notre Vic et Flo national, Gloria, grand favori du Chili, et un film roumain sur le même sujet, Elle s'en va aurait pu se distinguer. Mais à côté de ces trois autres films, autrement plus audacieux dans la forme ou le propos, Elle s'en va ne fait pas le poids.

Heureusement que Catherine Deneuve a déjà remporté en 1998 l'Ours d'or d'honneur pour l'ensemble de son oeuvre, car cette fois-ci, elle risque de ne rien gagner, sinon un prix qu'elle a déjà remporté en 2008: le prix Gérard de l'actrice que les journalistes appellent encore mademoiselle plutôt que mémé.