La 30e édition du festival Vues d'Afrique, qui s'ouvre vendredi soir à Montréal, est teintée par les troubles qui ont secoué bon nombre de pays du continent africain au cours des derniers mois.

Plusieurs films témoignent notamment de la crise malienne et de l'instabilité dans le pays, après la prise de contrôle du nord du Mali par des islamistes radicaux.

La directrice de la programmation du festival, Gisèle Kayembe, estime que ces nouvelles productions permettent d'aborder avec «humanité» et de «manière artistique» un conflit qui autrement n'aura été vu que dans les bulletins de nouvelles.

Les rêves de la jeune génération révolutionnaire qui tente d'influencer la société marocaine trouve pour leur part échos dans le Chant des tortues, un film qui s'intéresse à ceux qui ont fait entendre pour la première fois leur voix à la planète lors du printemps arabe.

La programmation éclectique du festival est composée d'une centaine d'autres productions cinématographiques provenant d'Afrique, mais aussi des pays créoles.

La quasi-totalité des films de Vues d'Afrique n'ont jamais été présentés sur des écrans canadiens. Les organisateurs sont très fiers d'apporter du sang neuf dans le paysage cinématographique québécois.

«Plusieurs de nos films sont collés sur l'actualité ou encore abordent les conséquences actuelles d'événements des dernières années. Ainsi, certains films s'intéressent à la situation politique et à l'aide humanitaire en Haïti, un autre nous présente les dessous du génocide au Rwanda, alors que l'héritage de l'ex-président ivoirien Laurent Gbagbo est abordé dans un excellent documentaire», rapporte la programmatrice.

Films colorés et festifs

La directrice de la programmation de Vues d'Afrique insiste sur le fait que son festival est aussi le reflet d'une Afrique joyeuse, colorée et festive.

La soirée d'ouverture sera d'ailleurs teintée par cette bonne humeur légendaire des Africains, alors que sera présenté Aya de yopougon. Ce film de la Côte d'Ivoire catapultera le public tout droit dans les quartiers effervescents d'Abidjan.

«On a beaucoup parlé d'une Afrique marginale et humanitaire, mais il faut arrêter ce stéréotype. Oui, il y a des enjeux sociaux, mais il y a plusieurs autres facettes au continent. Le cinéma africain témoigne des rêves et de l'avenir qui se dessine à l'horizon. Nous voulons donner le goût aux gens d'ici d'aller visiter ce continent coloré, riche culturellement et accueillant!», lance Mme Kayembe, avec conviction.

Et le public d'ici pourra aussi se frotter à l'humour africain pendant le festival, alors qu'une table ronde dédiée aux séries télévisées est au programme. «Il y a les télénovelas espagnol, mais aussi nos séries africaines, qui racontent avec humour la vie du quotidien. Mais il faut être prêt à rire beaucoup et avoir les côtes solides!», avertit-elle.

En 30 ans de festival, la programmatrice dit qu'elle et ses pairs au Festival ont vu le cinéma africain se transformer. Elle se réjouit que son événement puisse toujours être présenté, malgré la disparition de certaines subventions à la culture.

Rêver grand

Afin de rejoindre encore davantage le public, Vues d'Afrique mise à nouveau cette année sur trois vitrines. Ainsi, des films sont présentés autant à Montréal (25 avril au 4 mai), qu'à Québec (28 avril au 2 mai) et Ottawa (29 avril au 1er mai).

«À Québec, ça fait 25 ans qu'on le fait et à Ottawa, ça fait 6 ans. C'est important pour nous de faire connaître nos films pas seulement à Montréal. Nous voudrions même être ailleurs au Canada», fait savoir Mme Kayembe.

En entrevue à La Presse Canadienne, elle révèle que le festival souhaiterait dès l'an prochain étendre ses tentacules jusqu'à Vancouver et partager sa vision cinématographique de l'Afrique avec la Côte ouest du pays.