Nous avons demandé à Benoît Gouin de commenter 10 œuvres dans lesquelles il a joué parmi la soixantaine de pièces, la quarantaine d’émissions dramatiques à la télévision et la vingtaine de longs métrages où son talent est mis en valeur.

Théâtre – Qui a peur de Virginia Woolf ? (1989), d’Edward Albee. Mise en scène : Albert Millaire.

PHOTO LÉOPOLD ROUSSEAU, FOURNIE PAR LE THÉÂTRE DU BOIS DE COULONGES

Trois ans après avoir été promu au Conservatoire d’art dramatique de Québec, Benoît Gouin a notamment donné la réplique à Monique Miller dans Qui a peur de Virginia Woolf ?.

Peu de temps après sa sortie du Conservatoire d’art dramatique de Québec, Benoît Gouin monte sur la scène du Théâtre du Bois de Coulonges, aujourd’hui disparu, pour tenir un rôle dans la célèbre pièce d’Edward Albee. Dans une mise en scène d’Albert Millaire, Monique Miller et Jean Besré incarnent les mythiques personnages Martha et George, alors que le jeune acteur forme sur scène un couple avec une camarade rencontrée au Conservatoire : Céline Bonnier. « Nous sommes des amis depuis maintenant plus de 35 ans, précise Benoît Gouin. Céline est dotée d’un talent fou. Quand, des décennies plus tard, je me suis fait offrir de jouer avec elle dans L’heure bleue, je n’ai pas eu à y penser bien longtemps. C’est très agréable de jouer avec quelqu’un de qui on est proche. »

Théâtre – Dom Juan (1993), de Molière. Mise en scène : Serge Denoncourt.

PHOTO DANIEL MALLARD, FOURNIE PAR LE THÉÂTRE DU TRIDENT

Benoît Gouin et Lorraine Côté dans une production de Dom Juan, mise en scène par Serge Denoncourt au Théâtre du Trident

« Dom Juan est mon premier rôle marquant au théâtre, survenu à l’époque où Serge Denoncourt est arrivé à la barre du Trident. Je m’apprêtais à m’installer à Montréal à ce moment-là, mais cette proposition m’a retenu à Québec quelques années de plus. J’ai eu l’occasion de travailler de nouveau avec Serge par la suite, notamment pour Méphisto. Le théâtre a toujours fait partie de ma vie. J’ai participé à une soixantaine de spectacles, jusqu’à L’éducation de Rita, en 2019, où j’ai joué en compagnie d’Émilie Bibeau. Je remonterai sans doute sur les planches, mais après une grosse série exigeante comme Larry, j’ai besoin d’un petit temps de recul. J’ai enchaîné les projets pendant des années, ce qui est une grande chance, mais je comprends maintenant ce qu’est le besoin de se ressourcer. »

Cinéma – Québec-Montréal (2002), de Ricardo Trogi. Scénario : Patrice Robitaille, Jean-Philippe Pearson et Ricardo Trogi.

« Toute cette bande de Québec avait déjà fait des choses auparavant, mais elle a pu se faire connaître grâce à ce film, dont personne n’aurait pu prévoir le succès. Quand on regarde la distribution de Québec-Montréal aujourd’hui, c’est assez impressionnant de constater à quel point ces gens peu connus à l’époque ont amorcé une nouvelle vague du cinéma québécois. Je n’ai eu que quatre ou cinq jours de tournage – c’était ma première fois au cinéma –, mais Michel Gauvin-Mike Gauvin a été le rôle le plus marquant de ma carrière. Dès le lendemain de la sortie, les gens me pointaient en m’interpellant dans la rue. Le personnage portait un autre nom dans le scénario, mais il a fallu le changer. J’ai alors suggéré Gauvin, pas très loin de Gouin. Ce fut ma modeste contribution ! »

Télévision – Grande Ourse (2004), de Patrice Sauvé. Scénario : Frédéric Ouellet.

PHOTO FOURNIE PAR RADIO-CANADA

La série Grande Ourse correspond à la première vraie rencontre entre Benoît Gouin et le réalisateur Patrice Sauvé.

« De cette aventure, je garde le souvenir d’une belle folie. J’avais déjà travaillé avec Patrice Sauvé pour La vie, la vie, où je jouais le rôle du mari de Diane Lavallée, mais c’est avec Grande Ourse que j’ai vraiment eu l’occasion de le connaître. J’aime son esprit effervescent. Comme il y avait aussi un aspect ésotérique à l’histoire, j’ai eu l’occasion de jouer des scènes assez intenses, particulièrement dans un épisode qui m’a valu de remporter un Gémeaux ! Chaque fois que j’ai eu l’occasion de retravailler avec Patrice, que ce soit dans Karl & Max ou La faille, ce fut heureux. Notre complicité s’est encore accrue grâce à Larry. »

Théâtre – My Fair Lady (2006). Paroles et livret : Alan Jay Lerner. Musique : Frederick Loewe. Mise en scène : Denise Filiatrault.

PHOTO SUZANNE O’NEILL, FOURNIE PAR LE THÉÂTRE DU RIDEAU VERT

Catherine Sénart, Benoît Gouin et Pierre Collin dans My Fair Lady

« Denise Filiatrault m’a permis de relever un défi extraordinaire. Trois heures sur scène. J’aime ce genre de show, exigeant, et j’ai beaucoup aimé travailler avec Denise. Quand tu lui offres ce qu’elle souhaite, c’est formidable. Mais si tu ne travailles pas, alors là, oui, elle peut s’impatienter. J’ai tout fait pour être bien prêt : j’ai acheté un piano, j’ai répété toutes les chansons, j’ai bien appris mon texte, bien conscient que pour un tel spectacle, il est impossible de faire autrement. Avec Denise, cette approche a vite bien fonctionné, même si je l’avais bien prévenue de mon absence de formation de chanteur. Elle m’a répondu que Rex Harrison n’en avait pas non plus. Ce fut une aventure incroyable. On a fait 120 représentations ! »

Cinéma – J’ai tué ma mère (2009). Scénario et réalisation : Xavier Dolan.

PHOTO JULIEN HÉBERT, FOURNIE PAR K-FILMS AMÉRIQUE

La célèbre tirade d’Anne Dorval dans J’ai tué ma mère, de Xavier Dolan, était destinée au personnage qu’incarne Benoît Gouin.

Benoît Gouin n’a qu’une scène dans J’ai tué ma mère. Celle où, à titre de directeur de pensionnat, il subit au téléphone la célèbre tirade que lance le personnage de mère que joue Anne Dorval. « Le plus drôle est qu’Anne Dorval et moi n’avons pas tourné cette scène ensemble ! J’ai connu Xavier lorsqu’il était âgé de 15 ans. Je le croisais dans les corridors de studios de doublage. Il m’a envoyé son scénario – il avait alors 17 ans – en me disant qu’il n’avait pas grand-chose à m’offrir, mais qu’il me verrait bien dans le rôle du directeur. J’ai tourné la scène un dimanche matin, et c’est Xavier qui me donnait la réplique. Il est quand même assez amusant de penser que c’est souvent cette séquence qu’on retient de ce film, sans que personne ne se rappelle que j’y joue ! Cela dit, je suis très fier de cette petite participation, surtout dans le premier film d’un jeune génie ! »

Cinéma – Gabrielle (2013). Scénario et réalisation : Louise Archambault.

Le personnage qu’incarne Benoît Gouin dans Gabrielle est directement inspiré d’un intervenant œuvrant auprès d’adultes intellectuellement handicapés. « Ce film, ce rôle, c’était vraiment un beau cadeau. Je suis même un peu ému quand j’en parle. Jouer avec des acteurs du Centre des arts de la scène Les Muses te reconnecte tellement avec la vérité du jeu. Ils sont là, entièrement dans le moment présent, et ils t’obligent à être à leur écoute. Tu te dois de les suivre, de te connecter à eux. Ça nous ramène à un instinct de jeu tellement plus pur. Vraiment, j’ai trouvé cette expérience merveilleuse. Et puis, le grand sourire de Gabrielle Marion-Rivard est irrésistible. »

Cinéma – Lac Mystère (2013). Scénario : Diane Cailhier. Réalisation : Érik Canuel.

Dans ce thriller à l’humour noir campé dans un endroit isolé au bord d’un lac, Benoît Gouin incarne un policier psychopathe un peu beaucoup obsédé… « Là aussi, on est guidés par le pur plaisir du jeu, mais dans une mosaïque plus particulière, très mystérieuse. Je me suis beaucoup amusé. Je suis allé à fond pour jouer ce gars jaloux, qui porte un chapeau de cow-boy et qui se pense le roi de la place. Je comprends que des gens aient eu un peu de difficulté avec ce mélange de genres, mais cette galerie de personnages me faisait personnellement grandement rire. Nous avions une grande liberté. Érik [Canuel] étant un grand enthousiaste, nous avons pu proposer des choses et le tournage s’est déroulé dans une atmosphère de plaisir. À l’arrivée, c’est surtout ça qui compte. Un bel esprit d’équipe s’est formé, car on tournait en extérieur. C’est souvent le cas quand on tourne à l’extérieur de Montréal. »

Cinéma – Les loups (2015). Scénario et réalisation : Sophie Deraspe.

Dans ce film dont le récit est construit autour de la venue dans les Îles, en plein cœur de l’hiver, d’une fille de la ville dont on ne sait trop ce qu’elle cherche, Benoît Gouin se glisse dans la peau d’un homme ayant peut-être un lien avec l’inconnue. « Nous avons tourné Les loups aux Îles-de-la-Madeleine pendant deux mois. C’était merveilleux. Sophie [Deraspe] est une fille de terrain, qui aime explorer. On sent qu’elle a un œil et on sait quelle est son intention dans sa réalisation. Sur le plateau d’Antigone, c’était pareil. Sophie est une artisane. J’aime travailler avec elle, car elle reste à l’affût de tout ce qui peut se passer. On a ainsi l’impression de participer activement à son processus créatif. C’est vraiment beau de la voir à l’œuvre. »

Télévision – L’heure bleue (2017 – 2021). Textes : Anne Boyer et Michel d’Astous. Réalisation : Stéphan Beaudoin, Anne de Léan, Yannick Savard, Charles-Olivier Michaud.

PHOTO ERIC MYRE, FOURNIE PAR TVA

L’heure bleue est le premier téléroman dans lequel Benoît Gouin a tenu le rôle principal masculin.

« C’était la première fois qu’on m’offrait un rôle principal dans un téléroman et il m’a été proposé directement par les auteurs. Quand on m’a dit que ma partenaire serait Céline Bonnier, c’est alors devenu une évidence. Et puis, se faire offrir un rôle important dans une continuité, c’est déjà très tentant. Le rythme de travail est différent, mais un esprit de famille s’installe. J’estime aussi que quand on tient un rôle principal dans un téléroman ou une série, il est important de bien prendre soin des actrices et des acteurs qui viennent jouer des rôles épisodiques. Parce que je me rappelle les fois où on ne l’a pas toujours fait pour moi quand j’étais dans cette situation. Ça me semble important pour la qualité de l’ensemble. »