L’excentrique Cruella de Vil fait partie des personnages les plus mythiques (et les plus méchants) de Disney. Mais d’où tient-elle cette arrogance et ce mépris pour les conventions, qui l’ont rendue si célèbre ?

Les producteurs du film en prise de vues réelles Cruella cherchaient à cerner le passé de l’extravagante créatrice de mode depuis un certain temps lorsqu’ils ont pressenti le réalisateur australien Craig Gillespie.

« C’était peu après le lancement du film I, Tonya, s’est rappelé le cinéaste au cours d’une entrevue virtuelle. J’ai senti qu’ils voulaient faire quelque chose qui repousserait plus loin les limites. Par la suite, j’ai constamment cherché à savoir où était tracée la ligne à ne pas franchir et je ne l’ai jamais trouvée. »

Enthousiaste à l’idée qu’Emma Stone (l’une des productrices déléguées du film) incarne Cruella, il s’est immédiatement intéressé au scénario, qui était déjà établi. Il a fait appel à Tony McNamara, avec qui il travaillait sur un autre projet, et qui a écrit le scénario de The Favourite mettant notamment en scène Emma Stone. Ensemble, ils se sont creusé les méninges pour créer une véritable animosité entre deux rivales hors du commun, Cruella de Vil (Stone) et la baronne von Hellman, personnifiée par Emma Thompson. Le duo s’affronte sur la scène de la mode londonienne, dans les années 1970.

PHOTO LAURIE SPARHAM, FOURNIE PAR DISNEY

Le réalisateur Craig Gillespie, sur le plateau du film en prise de vues réelles Cruella

« Je cherchais à donner un certain ton au film, a précisé le réalisateur. C’est un ton avec lequel je suis très à l’aise, que j’ai utilisé dans Lars and the Real Girl, United States of Tara et I, Tonya. J’aime lorsque les scènes sont à la fois drôles et bouleversantes ou douloureuses à regarder. Je vibre au même diapason que Tony et je savais, en lisant ce qu’il avait écrit, que les deux Emma seraient en mesure de relever le défi. »

PHOTO FOURNIE PAR DISNEY

La baronne von Hellman, interprétée par Emma Thompson, est sur le point d’entrer dans le magasin Liberty, à Londres, au son de la chanson Five to One, de The Doors.

Comme il a tendance à le faire, Craig Gillespie a aussi privilégié l’utilisation de chansons, plutôt que d’une musique composée spécialement pour le film, pour créer l’atmosphère. « J’ai l’impression que la musique cherche à manipuler les spectateurs pour les amener à ressentir des émotions bien précises, a-t-il expliqué. L’utilisation de chansons est plus astucieuse, parce qu’il y a plusieurs niveaux. C’est aux spectateurs de décider comment ils se sentent. Parfois, je ne sais pas moi-même ce que je recherche. J’ai toujours des chansons sur le plateau. Lorsqu’on a filmé l’entrée en scène de la baronne, si imposante et clairement associée aux années 1950 et 1960, par exemple, cela avait du sens d’utiliser une chanson de ces deux décennies ou de big band. Sauf que lorsqu’elle est entrée dans le magasin Liberty, au milieu de gens qui couraient dans toutes les directions et se cachaient, j’ai commencé à faire jouer la chanson Five to One, de The Doors. Il y a un rythme qui suscite de l’appréhension. Cela n’a aucun sens d’avoir sélectionné cette chanson, mais émotionnellement, j’adore cela. Je ne l’ai donc jamais changée. »

Une histoire contemporaine

Le film explore donc les origines de Cruella de Vil, remontant jusqu’à sa naissance et son rejet par sa mère. Depuis qu’elle est toute jeune, Estella (de son vrai nom) arbore une chevelure noir et blanc et démontre un sens du style. Elle éprouve aussi de la difficulté à se conformer aux attentes des autres. Le long métrage raconte son évolution et sa métamorphose en Cruella d’une façon fort contemporaine.

Elle possède ce talent, ce dynamisme et cette personnalité que tout le monde essaie de supprimer parce que cela ne correspond pas aux idées établies. Elle-même essaie de refouler sa vraie nature, mais cela ne fonctionne pas, jusqu’à ce qu’elle puise dans qui elle est réellement. Elle a un bagage émotif qui complique les choses, mais elle ne trouve sa voix que lorsqu’elle s’accepte.

Craig Gillespie, réalisateur du film Cruella

PHOTO FOURNIE PAR TSG ENTERTAINMENT

Le film explore les origines de Cruella de Vil. Estella (de son vrai nom), interprétée par Emma Stone, essaie d’abord de refouler sa vraie nature et dissimule la couleur de ses cheveux.

L’intégration d’un personnage appartenant ouvertement à la communauté LGBTQ+, Artie, un passionné de mode, s’est faite naturellement, a-t-il précisé. « L’équipe de production a abordé ce film comme s’il s’agissait d’un film indépendant sur une entrée dans l’âge adulte en 1971, et non un long métrage de Disney. Cruella n’a aucun pouvoir magique et elle est ancrée dans la réalité. J’ai fait beaucoup de recherches sur la scène de la mode dans les années 1970 à Londres et j’avais un souci d’authenticité, particulièrement en ce qui concerne les tenues vestimentaires. J’ai aussi voulu faire un film que l’enfant de 12 ans en moi voudrait voir. Les personnages sont étoffés et il y a beaucoup de choses très drôles, comme des rats et des chiens qui, en avalant un collier, demeurent présents tout au long du film. »

Mais ce qui l’allume le plus, c’est la performance des deux Emma, qui s’envoient des flèches sarcastiques et interagissent avec intelligence. « C’est le cœur du film », estime-t-il.

Cruella sera présenté en salle et sur Disney+ avec l’Accès Premium dès le 28 mai.