Dix-huit chansons, dont plusieurs de leurs classiques remaniés, l’énergie du direct dans un environnement visuel à la fine pointe de la technologie, des touches d’humour absurde : Les Trois Accords offrent avec le film Live dans le plaisir exactement ce qu’ils annoncent. Le chanteur Simon Proulx et le réalisateur Louis-Philippe Eno nous ont parlé de ce projet ambitieux et réjouissant.

Beaucoup de plaisir, c’est le titre du sixième et plus récent album des Trois Accords, sorti il y a deux ans et demi, et aussi de la tournée qui a suivi. « Une tournée vraiment tripante », nous dit Simon Proulx, tellement que le groupe avait prévu en faire une captation.

« Surtout qu’on a très peu d’images de nous live. On est super poches en archivage. »

Avec la pandémie l’idée n’est pas tombée à l’eau, mais vu l’absence de spectacles, elle s’est transformée en projet cinématographique. Et le groupe a vu l’occasion d’élargir l’univers de cet album « super cool » en y intégrant – et en y déconstruisant – certaines de leurs chansons les plus connues.

On est allés chercher les mêmes influences, le même genre de son, la même rythmique très intense. Comme si je venais d’écrire Dans mon corps et que je la présentais aux gars en disant : " OK, on fait quoi là-dessus ? "

Simon Proulx, chanteur, auteur et compositeur des Trois Accords

Un procédé quand même long qu’il n’aurait pas été possible de faire en pleine tournée.

« Ce n’est pas facile de désapprendre ce que tu joues depuis 10, 15 ans et de trouver de nouvelles idées. Mais on a eu de belles surprises. »

Le groupe a d’ailleurs refait appel au réalisateur de l’album, Gus van Go, qui a « veillé au grain ». C’est ainsi que des chansons comme Hawaïenne, Elle s’appelait Serge, Les dauphins et les licornes ou Saskatchewan se sont retrouvées avec un tout autre habillage, plus percussif et percutant.

« Au début, on se disait : il y a du monde pour qui ces chansons signifient quelque chose. On ne voulait pas scrapper leur toune ! Mais en même temps, elles existent encore, on ne les anéantit pas, on fait juste explorer autre chose. »

Captation

La captation a été faite chez MELS, dans un nouveau studio utilisé pour les tournages virtuels. Les musiciens ont joué entourés d’immenses écrans, sur lesquels défilaient des images illustrant chaque chanson.

« On voulait que ça représente l’esprit de l’album, avec des trucs étonnants d’une toune à l’autre », explique Simon Proulx.

C’est le réalisateur Louis-Philippe Eno, collaborateur de longue date du groupe – il a tourné la majorité de leurs clips depuis Hawaïenne ainsi que contribué à définir les concepts de leurs pochettes et même de leurs albums depuis Dans mon corps, en 2009 –, qui a choisi les images en épluchant les banques d’images d’archives (stock footage) et créé chaque univers.

« C’est sûr qu’avec ce titre, il fallait que ce soit éclaté et qu’on ne s’ennuie pas », dit Louis-Philippe Eno, qui a toujours aimé l’intelligence et l’esprit de liberté du groupe.

« Mais tu ne peux pas aller aussi loin pendant une heure dans l’absurde ou le décalé comme dans un clip, sinon c’est trop. » L’idée était de ne pas voler la vedette à la musique et aux performances. Et aussi de « livrer la marchandise » et d’avoir, oui, beaucoup de plaisir.

Un show des Trois Accords, c’est fait pour avoir du fun.

Louis-Philippe Eno, réalisateur

Entre chaque chanson, il y a d’ailleurs des images tournées en VHS avec des techniciens-ninjas portant des cagoules. On peut aussi entendre des messages téléphoniques dans lesquels les membres du groupe réclament leur solo et où planent des menaces d’enlèvement…

« Il fallait qu’on soit caves, aussi ! », rigole Simon Proulx, qui aime bien cette mise en abyme – « On discute de ce qui va se passer dans le film… pendant le film ! » – et le fait qu’on voie les dessous du tournage.

« C’est cool que ce soit un peu méta, qu’on voie les fils, l’arrière de l’écran. On se sent moins justes comme dans un long clip. »

Énergie

Le film sera présenté sur près de 50 écrans au Québec, mais Simon Proulx sait bien que ce genre de captation ne se retrouve pas normalement au cinéma. « J’aurais été content avec trois salles. C’est circonstanciel, mais ça permet de tester des choses ! »

Alors que le groupe de Drummondville n’a pas encore confirmé que son Festival de la poutine aurait lieu – « On fait toutes sortes de plans pour qu’il y en ait un, il faut juste trouver une formule qui puisse fonctionner » –, Les Trois Accords ont aussi repris la route et s’accommodent du public distancié.

« On se disait : ça va être étrange, avec les masques, tu ne vois pas ce que les gens pensent… Mais après notre premier show à Amqui, on a trouvé ça quand même cool. Je ne dirais pas que c’est aussi le fun que jouer devant 3000 personnes qui crient… mais on a ouvert la porte pour en faire d’autres, alors qu’au début, on ne voulait pas. »

Les gens ont besoin de voir des spectacles, croit-il, et l’« énergie du live » n’a pas son égal. Donc, pas de film pour remplacer la tournée lors du prochain album ? Simon Proulx éclate de rire.

« Après tout ça, tu trouverais que je suis ben bullshitteur ! Alors finalement, c’était cool de faire un film, et si vous voulez nous voir en show, allez au cinéma ! »

Live dans le plaisir est à l’affiche à compter de ce vendredi.

IMAGE FOURNIE PAR LA TRIBU

Live dans le plaisir, de Louis-Philippe Eno

Documentaire musical
Live dans le plaisir
Louis-Philippe Eno
Avec Les Trois Accords
1 h 25