Alexandra Kotcheff et Hannah Leder ont écrit, réalisé, produit et joué dans The Planters, film qui raconte l’histoire de deux femmes isolées et opposées découvrant le pouvoir de l’amitié. La détermination des deux artistes à aller au bout de leur projet a été payante. The Planters est une des comédies les plus savoureuses et singulières de l’année.

Martha Plant est la personne la plus isolée et la plus farouche de la terre. Un jour, aux portes du désert, sa route croise celle de Sadie Mayflower, bombe de couleurs et d’énergie à la triple personnalité. Étincelles en vue ? Non. Une amitié est née ! Déjà, le scénario est prometteur. La mise en scène, épurée, inventive et émaillée de passages décapants, prend l’histoire à bras-le-corps pour la balancer dans l’espace.

The Planters, c’est ça. Un film fait avec deux bouts de ficelle et une équipe minimaliste devenu une des plus étonnantes propositions du cinéma de l’année. De quoi se réjouir en ce mois de novembre où l’on installe prématurément ses lumières du temps des Fêtes dans l’espoir de chasser la pandémie.

PHOTO FOURNIE PAR LA PRODUCTION

Scène du filmThe Planters

N’ayons pas peur des mots. The Planters est la rencontre de deux rejets habitués des trous noirs qui, soudainement, trouvent une lumière dans l’autre en dépit des aspérités se dressant sur leur parcours respectif.

« De façon consciente comme inconsciente, je crois que Hannah et moi voulions montrer le pouvoir inconditionnel de l’amitié entre deux personnes », dit Alexandra Kotcheff, jointe par téléphone au Mexique.

Nous sommes tous, d’une façon ou d’une autre, des êtres solitaires. Nous sommes tous un peu étranges, mais l’acceptation de l’autre est quelque chose de réel.

Alexandra Kotcheff

— Donc, l’amitié comme outil pour faire échec à la solitude ?

— Exactement ! répond-elle de sa voix rieuse.

Un nom familier

PHOTO JEREMYJACKSONPHOTO.COM, TIRÉE DU SITE IMDB

Alexandra Kotcheff

Le nom Kotcheff vous est familier ? Ne soyez pas surpris ! Oui, la jeune femme qui a célébré ses 34 ans mardi est la fille de Ted Kotcheff, qui, dans les années 1970, a tourné à Montréal le film L’apprentissage de Duddy Kravitz, avec Richard Dreyfuss et Micheline Lanctôt. Et le premier opus de Rambo quelques années plus tard.

L’an dernier, alors que le festival Fantasia rendait hommage au cinéaste, ce dernier avait raconté à La Presse ce jour où, en tournant la finale de Rambo, il avait, à la suggestion de Sylvester Stallone, gardé le héros en vie, contrairement au scénario original. « J’avais suivi mes instincts », disait-il.

Alexandra a-t-elle hérité de ce trait de caractère ? « C’est l’unique façon de faire, dit-elle en riant. Lorsque vous voulez devenir un réalisateur de films, un artiste, vous devez suivre votre instinct, prendre des décisions rapides. C’est une des leçons que j’ai apprises de mon père. Ce fut un bon modèle. »

Comédie noire

Dans un récent article consacré à The Planters, The Hollywood Reporter trace un parallèle avec l’univers de Wes Anderson et évoque des accents « lynchiens ».

La cinéaste admet aimer ces deux réalisateurs, mais ajoute avoir plusieurs autres influences : les grands noms de la Nouvelle Vague, Miranda July, les frères Coen, Chaplin, Buñuel…

Même si le sujet de son film pouvait être infiniment triste, il est abordé dans l’angle de la comédie noire, avec de rares personnages secondaires aussi décalés que ceux de Martha (Kotcheff) et Sadie (Leder).

« Ce film est l’écho de l’amitié que Helen et moi portons l’une pour l’autre, dit la comédienne. Même en temps difficiles, nous essayons toujours de faire rire l’autre. »

Au plus bas de la vie, une vraie amie va te faire sourire et, à l’intérieur de toi, tu vas voir une lumière. Tu te dis : je ne vais pas périr.

Alexandra Kotcheff

Pour employer un vieux poncif, force est d’admettre que le décor est un personnage dans le film. La maison dans laquelle vit Martha est plantée quelque part entre le désert californien et la fausse mer intérieure appelée Salton Sea. « L’endroit le plus bizarre que j’ai vu, dit Alexandra Kotcheff. Cela a quelque chose de terrifiant. »

Avec des personnages décalés dans un paysage lunaire, il faut s’attendre à une histoire tordue. Elle l’est. Le titre The Planters fait allusion au fait que Martha occupe ses temps libres en volant des babioles dans le seul magasin déserté du coin et les enterre dans le désert. Guidés par un plan que Martha colle sur le panneau communautaire du village, des étrangers retrouvent les « trésors » et laissent quelques dollars en échange. Le reste de l’histoire est à l’avenant.

— Que partagez-vous avec Martha ?

— Quand les gens me rencontrent, ils me disent que je ne suis pas du tout comme elle, répond l’intéressée. Mais comme elle, je me questionne sur le monde. Elle est ouverte d’esprit. Je dirais que c’est ma voix intérieure.

Le poids de toutes les critiques positives reçues ne fait pas peur à Mmes Kotcheff et Leder. Elles ont déjà commencé à écrire leur prochain film. Une autre comédie noire. « Je prends les choses une à la fois, dit Alexandra Kotcheff. Et je suis très excitée par ce nouveau projet. »

The Planters est offert sur la plateforme du Cinéma Moderne.

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Une discussion virtuelle avec les réalisatrices aura lieu le samedi 21 novembre à 16 h, animée par Dara Moats dans le cadre de la série cELLEuloid.

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