Patrick Hivon sera en vedette dans le film Babysitter dont le tournage s’est récemment terminé. Après une visite sur le plateau, La Presse a discuté avec le comédien qui réfléchit sur le personnage controversé de Cédric et exprime sa joie de retravailler avec la réalisatrice Monia Chokri.

Patrick Hivon a grandi entouré de femmes. Sa mère, sa grand-mère, sa sœur, sa tante. « Des battantes », dit-il. Il insiste sur les principes d’égalité, de respect et dénonce la misogynie. Il est par ailleurs conscient des dérives du politiquement correct. « Dans n’importe quoi qui est bien, si tu vas trop loin, tu tombes dans le ridicule. »

Voilà un peu l’essence de la pièce de théâtre Babysitter, de Catherine Léger, que la cinéaste et comédienne Monia Chokri vient d’adapter en un long métrage et dans lequel, incarnant le personnage de Nadine, elle donne elle-même la réplique à M. Hivon.

Le tournage du film s’est récemment terminé, et l’œuvre est entrée en postproduction. Début octobre, La Presse a fait un saut sur le plateau alors qu’on tournait une scène en extérieur sur un terrain du port de Montréal jouxtant les studios Mels.

Quiconque a vu la pièce sait qu’on y parle de la banalisation de la violence faite aux femmes, de féminisme, de misogynie. L’histoire s’amorce avec un geste hautement répréhensible que commet Cédric, homme dans la trentaine, jeune père de famille qui aime s’étourdir de temps à autre lors de sorties entre gars.

Dans la pièce, Cédric crie une obscénité à la (vraie) journaliste sportive Chantal Machabée au terme d’un match de football. La scène sera différente dans le film, nous indique le producteur Martin Paul-Hus, d’Amérique Films.

Suspendu par son employeur, répudié par son frère journaliste (Steve Laplante), Cédric (Patrick Hivon) se retrouve, comme le dit son interprète, « dans la circonférence de l’ouragan qu’il a créé ». La dénonciation va toutefois tourner au dérapage alors que chaque protagoniste se met à théoriser sur le sens profond de chaque segment de l’affaire.

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

Plateau de tournage du film Babysitter de Monia Chokri. Le comédien, Patrick Hivon attend de tourner sa scène.

J’aime ce côté absurde de la pièce. Derrière la dénonciation, les personnages vont dans tous les sens. Ils vont trop loin dans le politiquement correct. Ils sont tellement loin dans leur tête qu’ils ne s’écoutent pas. Ils sont tous en silos, perdus dans un idéal qu’ils ne peuvent plus mettre en pratique.

Patrick Hivon

D’actualité, dure et crue, la pièce, présentée à La Licorne en 2017, avait aussi son côté tragi-comique que l’on retrouvera dans le film, dit M. Hivon. Comme dans la scène jouée le jour de notre passage où Cédric découvrait que Nadine transportait un dildo.

« Leur couple vient d’avoir un enfant. Ils essaient de mettre du piquant dans leur vie conjugale et c’est la nounou [incarnée par la comédienne française Nadia Tereszkiewicz] qui remet un dildo à Nadine », explique M. Hivon.

De voir le visage mi-horrifié, mi-outré de son personnage lorsqu’il découvre l’objet est assez révélateur, lui fait-on observer. « Cédric n’est pas du tout dans la même obsession, répond le comédien. Il va faire tout un saut en découvrant le dildo. On dirait qu’il devient sentimental et tendre alors que Nadine devient plus chasseresse. Je trouve que ce passage met beaucoup de lumière à l’histoire. »

Admiratif

Patrick Hivon et Monia Chokri ont joué ensemble dans le film Nous sommes Gold, d’Éric Morin, qui aurait mérité un meilleur sort au box-office. Monia Chokri a aussi dirigé Hivon dans son premier long métrage de fiction, La femme de mon frère. Les voilà réunis à nouveau.

Il faut entendre M. Hivon parler de sa collègue pour réaliser l’immense plaisir qu’il a à travailler avec elle.

« J’ai l’impression d’être aux premières loges de la naissance d’un magnifique papillon, dit-il à propos de la comédienne et cinéaste. En matière de réalisation, elle est en train d’éclore et d’assumer son style. Elle fait de l’art. C’est beau à voir. »

Peu importe les sujets qu’il aborde, Patrick Hivon le fait avec un amour de la vie très contagieux. Ainsi, lorsqu’on lui demande s’il a trouvé difficile de travailler en temps de pandémie, il répond avec un mélange d’humanité et d’émerveillement.

« C’était super ! lance-t-il. J’ai renoué avec mon milieu. J’ai été tellement touché de voir cette communauté où chacun est respectueux de l’autre. Les producteurs ont été à cheval sur les principes. Rien n’a été laissé au hasard. Ça met en lumière l’importance de ce que nous faisons. »