Tourné à Montréal en majeure partie, avec Yves Bélanger à la direction photo, Long Shot (Un bon coup en version française) est une comédie romantique ayant pour cadre une campagne présidentielle américaine. Charlize Theron et Seth Rogen sont les têtes d’affiche de ce film qui tente de ramener l’esprit de l’âge d’or hollywoodien, tout autant que celui des comédies à la When Harry Met Sally. Conversation avec le réalisateur Jonathan Levine.

Pourquoi avoir choisi de tourner votre film à Montréal ?

Il y a quelques années, j’ai tourné Warm Bodies chez vous et j’ai adoré ça. Je suis tombé amoureux des gens et des équipes techniques. L’intrigue de Long Shot se déroulant dans plusieurs grandes villes internationales, nous avions aussi besoin d’un endroit crédible sur ce plan. Mais au-delà de tout ça, il y a une expertise exceptionnelle chez les techniciens montréalais. Et puis, j’ai travaillé étroitement avec Seth Rogen, un membre de la royauté canadienne ! Or, il n’avait encore jamais rien tourné à Montréal. J’ai donc pu lui apprendre des choses sur une partie de son propre pays. C’était très drôle ! 

L’aspect plus politique du récit constituait-il une attirance particulière pour vous ?

Il s’agissait davantage d’un défi pour moi, je dirais. J’y ai pris goût au fil du tournage, mais considérant le climat politique qui règne dans mon pays présentement, très clivé, je savais qu’il ne serait pas facile de l’aborder. Et puis, les films que j’ai aimés quand j’étais jeune, When Harry Met Sally ou Say Anything par exemple, m’attiraient par leur aspect romantique. On ne trouve plus beaucoup de films de cette nature aujourd’hui. Je crois avoir lu le scénario de Long Shot une première fois il y a 10 ans, mais j’étais occupé sur d’autres projets à l’époque. Nous avons fait un dur travail d’adaptation pour rendre l’histoire actuelle, étant donné que nous vivons aujourd’hui dans un tout autre monde. Nous avons d’ailleurs ajouté le personnage de votre premier ministre !

Justement, le personnage du premier ministre du Canada, James Steward [interprété par Alexander Skarsgård], est une caricature à travers laquelle on peut facilement reconnaître Justin Trudeau. Or, les personnages qu’incarnent Charlize Theron, candidate à l’élection présidentielle, et Bob Odenkirk, le président en poste, n’ont rien à voir avec Hillary Clinton ou Donald Trump. Pourquoi ce choix ?

Je peux en tout cas vous dire que le personnage de votre premier ministre semblait beaucoup amuser l’équipe technique sur le plateau. Sa présence nous donnait une belle occasion de nous amuser en jumelant la réalité et la fantaisie. Pour les personnages américains, nous avons dû nous éloigner davantage de la réalité parce que nos politiciens, particulièrement notre président, ne font vraiment pas l’unanimité au sein de la population en ce moment. Nous sommes déjà assez divisés, pas besoin d’en rajouter.

La toute première scène de votre film laisse pourtant deviner une satire assez virulente, mais vous délaissez vite ce ton pour emprunter celui de la comédie romantique.

Dans ce genre de film, il faut trouver un certain équilibre pour ne pas froisser les gens, peu importe qu’ils soient de gauche ou de droite. Nous n’avions vraiment pas l’intention de commenter la réalité politique du pays. Pour ce faire, on peut compter sur des humoristes brillants comme John Oliver et Stephen Colbert, qui font du vrai commentaire tout en étant très drôles. Notre ambition est simplement de faire rire les gens avec un conte de fées romantique. Il fallait extirper la colère de l’équation parce que la colère se conjugue mal au romantisme. On a préféré se concentrer sur ce qui relie les êtres humains depuis toujours, d’où ces références au cinéma de l’ère de Frank Capra.

Vous avez travaillé avec Seth Rogen à l’époque de 50/50 et cette collaboration semble assez féconde. Qu’est-ce qui caractérise cette relation professionnelle ?

Nous nous complétons bien parce que nous partageons plusieurs intérêts, tout en ayant chacun nos priorités. Seth établit le ton comique. Et moi, je suis très près des personnages, de leurs émotions. Nous avons tous les deux aussi des critères très élevés pour la comédie. Si quelque chose se révèle trop stupide à nos yeux, on le retire tout simplement. À titre de cinéaste, je n’ai pas vraiment d’ego à cet égard. Je n’ai aucune réticence à accepter l’idée de quelqu’un d’autre si elle est meilleure que la mienne. Et j’essaie de créer un bel environnement de travail.

Comment le cinéma est-il entré dans votre vie ?

D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours voulu faire ça. Je réalisais déjà des films amateurs à l’âge de 12 ans. Quand j’ai commencé à apprendre vraiment le cinéma, mon enthousiasme s’est encore accru. Et je dois dire qu’à Montréal, les techniciens connaissent bien le cinéma, en tout cas d’une façon différente des autres équipes en Amérique du Nord. Je voudrais faire tous mes films chez vous !

Long Shot (Un bon coup en version française) prendra l’affiche le 3 mai.