À la fois comédie policière, film de braquage, drame sentimental et familial, L’innocent, quatrième long métrage de Louis Garrel à titre de cinéaste, est une vraie réussite. En s’inspirant d’un épisode réel de la vie de sa propre mère, la réalisatrice et actrice Brigitte Sy, celui qui a grandi dans une famille de cinéma rend aussi, par la bande, un vibrant hommage au métier d’acteur.

Ça commence par une scène où l’on voit des comédiens répéter. On découvrira très vite que ces derniers sont, en fait, des détenus qui, dans le cadre du milieu carcéral, participent à des ateliers de jeu menés par Sylvie (Anouk Grinberg). Cette toute jeune sexagénaire, subjuguée par le charme de l’un d’entre eux, dont la peine d’emprisonnement s’achève, tombera amoureuse au point de songer au mariage à l’intérieur même des murs de la prison, d’autant plus qu’elle est bien certaine de la sincérité des sentiments qu’éprouve Michel (Roschdy Zem) à son égard.

De cette histoire dont le point de départ est véridique (Brigitte Sy en a déjà fait un film – Les mains libres – avec, comme alter ego, la regrettée Ronit Elkabetz), Louis Garrel tire un récit à la fois touchant et complètement loufoque. Ce dernier se glisse lui-même – avec brio – dans la peau d’Abel, ce fils qui, dès le moment où il apprend que sa mère est amoureuse d’un détenu, doute des visées véritables de l’heureux élu. Craignant le pire, Abel fera tout pour protéger sa mère de cet homme, qu’il prendra en filature en souhaitant le prendre en défaut.

PHOTO EMMANUELLE FIRMAN, FOURNIE PAR MAISON 4 : 3

Louis Garrel tient le rôle principal dans L’innocent, film dont il signe également le scénario et la réalisation.

Accumulant les maladresses de celui qui n’a jamais eu l’expérience de ce genre de choses (ce qui donne lieu à des scènes vraiment très drôles), Abel est accompagné dans sa quête par sa meilleure amie Clémence (Noémie Merlant, dont la performance lui a valu le César de la meilleure actrice dans un second rôle). Les deux complices auront d’ailleurs de quoi se mettre sous la dent puisque, de fait, Michel doit discrètement participer à un braquage...

La magie du cinéma

Louis Garrel, dont les longs métrages précédents ont été écrits soit avec Christophe Honoré (Les deux amis) soit avec son mentor Jean-Claude Carrière (L’homme fidèle, La croisade), a cette fois fait appel au romancier Tanguy Viel (Insoupçonnable). Traversé par des éléments de franche comédie, le scénario, primé d’un César, mise d’abord sur le regard évolutif que pose Abel sur Michel, mais il explore également la nature des sentiments indéfectibles liant une mère à son fils.

La trop rare Anouk Grinberg, à qui les cinéastes font enfin de nouveau appel (vue dans Tromperie, d’Arnaud Desplechin, l’actrice est aussi de La nuit du 12, de Dominik Moll), fait ici flèche de tout bois dans le rôle d’une femme qui se donne, peut-être, une dernière chance à l’amour.

Flamboyante et bouleversante, c’est à elle que l’on doit en outre la tonalité d’un film faisant honneur à l’art de la variété. Sur ce plan, les amateurs de radios nostalgie seront choyés par une trame musicale faisant entendre Pour le plaisir (Herbert Léonard) et Nuit magique (Catherine Lara), en passant par Gérard Blanc (Une autre histoire) et des chansons populaires italiennes. Noémie Merlant affiche par ailleurs un don consommé pour la comédie et le tandem qu’elle forme avec Louis Garrel à l’écran fonctionne à merveille.

Retrouvant un peu l’esprit d’un cinéma du passé (ce qu’évoque graphiquement l’affiche), L’innocent est le fruit d’un vrai beau mélange de genres dont personne n’aurait pu prédire un aussi beau résultat. Appelons cela la magie du cinéma.

En salle

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L’innocent

Comédie

L’innocent

Louis Garrel

Avec Louis Garrel, Anouk Grinberg, Roschdy Zem

1 h 40

8/10