Au tournant du XXe siècle, Victoire Du Sault, fondatrice d’une cordonnerie qui sera à l’origine de la fortune de la famille Dufresne, est déchirée à cause d’un amour impossible, lequel la forcera à porter toute sa vie le poids d’un secret.

Reconnu grâce à des films comme Histoires d’hiver et Paul à Québec, François Bouvier a posé coup sur coup son regard sensible sur deux pionnières du Québec. Cinq ans après La Bolduc, voici La cordonnière, un drame biographique dans lequel est portée à l’écran l’histoire de Victoire Du Sault, entrepreneure qui, au début du siècle dernier, a fondé une entreprise de chaussures qui a rayonné à l’extérieur de nos frontières.

Le scénario que Sylvain Guy (Confessions, Mégantic) a tiré des premiers tomes de la série de romans de Pauline Gill reste fidèle à la vie professionnelle de l’héroïne sur le plan des faits, mais explore davantage la vie sentimentale de cette dernière, plus méconnue. L’histoire de Victoire Du Sault étant relativement peu documentée, les artisans ont ainsi pu s’immiscer dans un espace où les élans romanesques ont libre cours. Le principal enjeu de La cordonnière tourne ainsi autour des choix que doit faire une femme de cette époque, déchirée entre un amour passionnel et un amour de raison.

Pour la jeune Victoire (Rose-Marie Perreault), le visage de la passion interdite emprunte d’abord celui de Georges-Noël Dufresne (Pierre-Yves Cardinal), un voisin de 20 ans son aîné, marié, pour qui l’attirance est réciproque. Celui de la raison empruntera celui de Thomas (Nicolas Fontaine), le fils de Georges-Noël, avec qui Victoire fondera une famille. Grâce à une mise en scène délicate et attentive, François Bouvier parvient à traduire parfaitement le frisson douloureux – vécu en silence – qu’éprouvent Victoire et Georges-Noël dès qu’ils se retrouvent ensemble dans un même espace.

Empruntant une forme narrative très classique, le récit est narré par l’héroïne elle-même dans ses plus vieux jours (Élise Guilbault se glisse alors dans la peau de Victoire), à un moment où elle tient à dévoiler à son fils un secret qui n’étonnera personne.

Avec un destin aussi exceptionnel, il aurait été sans doute intéressant que soit mieux développé l’aspect professionnel de la vie d’une femme qui a dû se battre contre vents et marées pour exercer un métier jusqu’alors réservé aux hommes. Bien sûr, on fait écho à la force de caractère d’une jeune femme dont la persistance est admirable, mais le rayonnement de cette réussite, qui a fait en sorte que ses chaussures ont été vendues aux États-Unis, en Europe et au Moyen-Orient, est pratiquement passé sous silence. Comme si l’exploit remarquable de cette pionnière à cet égard n’avait aucune incidence dans la vie de cette dernière.

Les quatre acteurs principaux offrent de vibrantes compositions (particulièrement Rose-Marie Perreault dans le rôle de Victoire), la reconstitution d’époque est impeccable et l’ensemble est bien sous tous rapports, mais comme le récit se concentre uniquement sur la vie sentimentale de l’héroïne, c’est un peu comme s’il manquait un chapitre de son histoire.

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La cordonnière

Drame

La cordonnière

François Bouvier

Avec Rose-Marie Perreault, Pierre-Yves Cardinal, Nicolas Fontaine

1 h 44

6/10