Tenaillée par des pulsions étranges depuis son enfance, une jeune femme se fait repérer par un jeune homme de même condition et part avec lui, en marge de la société, sur les routes du Midwest américain, à la recherche de sa mère biologique.

Il y a quelques décennies, Catherine Deneuve et David Bowie incarnaient dans The Hunger (Les prédateurs), de Tony Scott, des vampires contemporains qui, ponctuellement, avaient besoin de trouver des proies humaines pour survivre. On retrouve un peu une dynamique semblable dans Bones and All, à la différence que les protagonistes mangent leur prochain plutôt que de se contenter de boire le sang de leurs victimes...

Ce point de départ – énorme – permet à Luca Guadagnino (Call Me by Your Name, Suspiria) d’insérer des éléments gore (mais pas trop) dans sa mise en scène, et de tirer un road movie campé dans le Midwest américain des années 1980, au cœur duquel figure une histoire d’amour exacerbée. Le vocable « romance cannibale », affublé à ce drame (inspiré du livre de Camille DeAngelis), se révèle ainsi assez juste.

Proposant une variation d’un thème classique, modulé sur tous les tons depuis le début de l’histoire du cinéma, le cinéaste italien parvient à emprunter une approche quand même originale, dans la mesure où il flirte à la fois avec les codes du film d’horreur et ceux d’une romance entre deux êtres qui se reconnaissent. Il maintient une tension constante, provoque l’effet escompté auprès du spectateur, sans pour cela jamais tomber dans la complaisance ou dans l’outrance. Guadagnino ne craint pas non plus les élans de lyrisme.

Du même coup, il dépeint de façon réaliste le contexte social dans lequel cette histoire se déroule, soit celui de l’Amérique profonde de l’ère Reagan. Sur ce plan, Bones and All est aussi le portrait d’une jeunesse marginalisée qui tente de trouver sa place, thème qui, bien sûr, trouve toujours un écho, peu importe l’époque.

Face à Timothée Chalamet, toujours impeccable, l’actrice canadienne Taylor Russell est une révélation. On soulignera également la présence, remarquable, du vétéran Mark Rylance. Aussi troublant que fascinant, Bones and All ne sera assurément pas du goût de tous, mais Luca Guadagnino propose ici un long métrage qui peut hanter l’esprit longtemps. C’est une grande qualité.

À la Mostra de Venise, pendant laquelle une première version de ce texte a été publiée, Bones and All a obtenu prix de la mise en scène, ainsi que le prix Marcello Mastroianni du meilleur jeune interprète, attribué à Taylor Russell.

En salle

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Bones and All

Drame fantastique

Bones and All

Luca Guadagnino

Avec Timothée Chalamet, Taylor Russell, Mark Rylance

2 h 10

7/10