À la tâche déjà difficile de porter à l’écran le destin d’un criminel s’est ajouté pour Luc Picard un défi supplémentaire : intéresser le spectateur à l’étonnante histoire du prolifique tueur à gages Gérald Gallant, malgré la personnalité très beige d’un homme en apparence sans histoire.

Celui dont on dit qu’il détient à son sinistre palmarès le plus grand nombre d’assassinats au Québec – 28 meurtres et une quinzaine d’attentats – n’a strictement rien à voir avec le profil d’un Henry Hill dans Goodfellas, ni, du reste, avec aucun des personnages ayant marqué le cinéma de Martin Scorsese, pas plus qu’avec les mafieux du Parrain.

En portant à l’écran le scénario de Sylvain Guy (Liste noire, Mafia inc.), librement inspiré d’un livre qu’ont publié les journalistes Éric Thibault et Félix Séguin, Luc Picard s’attarde plutôt à tenter de comprendre – sans toutefois donner de réponses – comment un type aussi « ordinaire », issu d’un milieu pauvre sur tous les plans, a pu en arriver à tuer de sang-froid autant d’inconnus. À cet égard, le comédien Picard livre une performance éblouissante, dans la mesure où il parvient à traduire avec grande sobriété le monde intérieur d’un type pour qui la seule façon d’intégrer un groupe – et de s’en faire apprécier – est de bien exécuter le travail qu’on lui demande de faire. Il voit ainsi son rôle comme celui d’un soldat ayant une mission à accomplir, les gens à abattre étant à ses yeux « de mauvaises personnes ».

Un grand paradoxe

C’est dire qu’on fait ici écho au grand paradoxe d’un homme qui, d’une part, peut tuer à bout portant quelqu’un que souhaite faire disparaître une organisation criminelle sans ressentir aucune espèce d’émotion, mais capable de vibrer dans les autres aspects de sa vie. Luc Picard maintient cet équilibre avec brio, en plus d’évoquer de façon très juste le bégaiement du personnage.

PHOTO ERIC MYRE, FOURNIE PAR LES FILMS OPALE

En plus de signer la réalisation de Confessions, Luc Picard prête ses traits à Gérald Gallant, protagoniste du film.

Confessions fonctionne sur la base d’un film noir – parfois teinté d’humour – dans lequel certains personnages périphériques ont également l’occasion de se distinguer. Retenons en outre les performances de David La Haye, remarquable dans la peau du complice à la langue bien pendue, de Sandrine Bisson dans le rôle de celle qui voudrait devenir la Bonnie de son Clyde, d’Éveline Gélinas en épouse qui ignore tout des activités de son mari, de même que de Catherine De Léan et de Louise Portal. Ces dernières incarnent toutes deux le rôle de la mère de Gérald, cruelle avec son fils toute sa vie durant.

Au-delà des activités meurtrières du protagoniste, illustrées de façon sèche et sans aucune complaisance, Luc Picard brosse aussi un portrait de la petite criminalité émergeant des franges les plus démunies de la société québécoise. Le récit est construit autour des témoignages qu’a livrés Gérald Gallant lors des nombreux interrogatoires auxquels il a dû se soumettre auprès d’un sergent (Emmanuel Charest) après son arrestation.

Sobre et efficace, s’inscrivant dans la tradition du genre, Confessions est un film bien interprété, solidement réalisé, qui ravira ceux que les portraits de criminels fascinent.

Soulignons également la qualité de la trame musicale, composée par Daniel Bélanger. Ce dernier signe d’ailleurs la deuxième bande originale de film de sa carrière, 17 ans après L’audition, du même Luc Picard.

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Confessions

Drame

Confessions

Luc Picard

Avec Luc Picard, Éveline Gélinas, Emmanuel Charest

1 h 49
En salle

7/10