Les derniers films vus par notre envoyé spécial à Cannes.

Mon année au Nicaragua

La Française Claire Denis aime camper ses récits dans des lieux peu accueillants pour ceux (souvent des étrangers) qui s’y trouvent. C’était le cas dans Beau Travail (1999), 35 rhums (2009) ou encore White Material (2010). Ce l’était aussi dans son premier long métrage, Chocolat, en compétition à Cannes en 1988. Et ce l’est de nouveau dans son deuxième film en compétition, The Stars At Noon, présenté mercredi. Adaptation du roman du même titre de Denis Johnson, ce thriller romantique finement réalisé met en vedette Margaret Qualley (que l’on a vue notamment dans My Salinger Year de Philippe Falardeau et vedette de la série Maid) dans le rôle d’une journaliste américaine qui en arrache au Nicaragua, pendant la pandémie. Son passeport a été confisqué, elle n’a plus de dollars américains, elle se sert de son corps pour obtenir des faveurs et se noie dans le rhum. Elle en arrachera encore plus après avoir rencontré un mystérieux homme d’affaires anglais, à une semaine de l’élection présidentielle nicaraguayenne. Le premier film de la compétition dans lequel on voit des masques contre la COVID-19 est aussi le plus sensuel, grâce au regard que pose Claire Denis sur les corps, mais son scénario est aussi mince qu’opaque.

Tragédie persane

PHOTO TIRÉE DU SITE WEB DU FESTIVAL DE CANNES

Les frères de Leïla

Une chronique familiale sur quatre frères chômeurs, que leur sœur Leïla tente de sortir de l’indigence, de la fraude et de l’endettement. Leur père, mouton noir de sa famille, souhaite à 80 ans, alors que sa santé est chancelante, gagner le respect de ses cousins et neveux, en leur faisant don du pécule qu’il a accumulé pour devenir « le parrain ». Plutôt que d’en faire profiter ses enfants. « C’est ça qui arrive quand on t’inculque des convictions plutôt que des réflexions », dit Leïla à son père. Elle et ses frères devront tout de même se demander : quel prix vaut la vie de leur père ? Dans Les frères de Leïla, le cinéaste d’origine iranienne Saeed Roustaee, 32 ans, met en scène une famille dysfonctionnelle qui s’insulte sans fin et qui prend une mauvaise décision après l’autre. Il y a de belles idées de mise en scène, la misogynie de la société patriarcale iranienne est de nouveau au premier plan, mais plus il s’enfonce dans la tragédie, plus le scénario (le film dure 2 heures 45 minutes) s’étire inutilement. Rappelons qu’il s’agit du deuxième film d’un cinéaste iranien en compétition, après Holy Spider d’Ali Abbasi, et que le jury compte le grand Asghar Farhadi.