En mai 2015, Mario, grand ami du cinéaste Carl Leblanc, a mis fin à ses jours. Perdre Mario retrace la descente aux enfers d’un homme qui avait toujours été un joyeux drille jusque-là et surtout la douleur et les questions sans réponse qu’il a laissées à ses survivants.

Pour Carl Leblanc, c’était « camarade Mario ». Clin d’œil à leur rencontre à Moscou, il y a des décennies de cela, alors que la Russie s’appelait encore l’Union des républiques socialistes soviétiques. Mario, visiblement grand rieur, s’était d’ailleurs présenté à lui comme ça : « camarade Mario, soviet de Drummondville ». Pour Carl, Mario, c’est aussi l’ami à qui il a demandé d’être témoin à son mariage et ensuite d’être le parrain de sa fille, Alice.

Mario, c’est aujourd’hui l’amitié rompue par une balle dans la tête. Le deuil, la culpabilité, l’incompréhension, les regrets, la tristesse, des sentiments qu’il partage avec « la bande du lac », cercle d’amis presque familial dont faisait aussi partie Mario.

C’est beaucoup à eux qu’il donne la parole dans Perdre Mario, un film qui raconte leur amitié, mais creuse surtout ce qui a mené Mario au suicide et l’impact de son geste sur ses proches. Sur son frère Jean, qui dit qu’on ne sort pas de l’explosion de remords de n’en avoir peut-être pas fait assez. Sur Alice aussi qui dit : « C’est une maladie [la dépression] et je la comprends pas, cette maladie. »

C’est pas ma faute, c’est pas ta faute, c’est la faute à personne, mais en même temps, c’est la faute à qui ?

Alice, dans Perdre Mario

La jeune femme cerne sans le savoir tout ce qui habite la bande du lac. Il y a ceux qui pensent que Mario n’aurait pas pu être sauvé de lui-même. Il y a ceux qui se demandent quels indices ils ont ratés. Il y a ceux qui regrettent de ne pas l’avoir appelé plus souvent et ceux qui lui en veulent – ou lui en ont voulu – de s’être isolé ainsi sans dire qu’il allait si mal. Tous l’auraient aidé.

Perdre Mario décortique avec beaucoup de doigté un sujet sensible. Carl Leblanc (Le cœur d’Auschwitz) parvient même à mettre beaucoup de vie – des rires, des sourires, des soupers arrosés – dans ce film hanté par la mort. Il fait ressortir une foule de réactions nuancées au suicide d’un proche. À travers son groupe d’amis – dont tous n’étaient pas chauds à l’idée de ce documentaire –, mais aussi en visitant un groupe d’aide pour les proches de suicidés.

Si le propos est fort, la forme du film, elle, s’avère par moments agaçante en raison de la place que prend la narration (par Luce Dufault) ou des extraits du journal retrouvé de Mario. On comprend le réalisateur d’avoir voulu en faire partager des extraits (fort habilement mis en images, par ailleurs), mais la lecture mélodramatique qu’en fait Robert Lalonde détonne par rapport à la sobriété et à la pudeur qui se dégagent de l’essentiel du film. Il demeure que Perdre Mario aborde de manière éloquente l’onde de choc d’un suicide sur les survivants.

Perdre Mario est présenté à la Cinémathèque québécoise et au Cinéma Beaubien à Montréal, et au Cinéma Le Clap Ste-Foy à Québec.

Perdre Mario

Documentaire

Perdre Mario

Carl Leblanc

Narration de Luce Dufault, voix de Robert Lalonde

1 h 25

6/10

Consultez l’horaire du film

Besoin d’aide ?

Si vous avez besoin de soutien ou avez des idées suicidaires, vous pouvez communiquer, de partout au Québec, avec un intervenant de Suicide Action Montréal au 1 866 APPELLE (1 866 277-3553).

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