En 2017, quelque 700 000 individus appartenant à la minorité musulmane rohingya ont fui les répressions génocidaires commises contre eux en Birmanie. Ils se sont entassés dans un camp de réfugiés au Bangladesh où, à travers le regard de Kalam, un des leurs, ils racontent, en mots et en silences, leur odyssée et leur quotidien.

À l’image des reportages télévisés, les documentaires sur les camps de réfugiés sont nombreux. Avec raison, puisque leurs auteurs se questionnent et s’inquiètent du sort de personnes non seulement parmi les plus pauvres, mais dont la vie a été mise entre parenthèses, sans nation, sans ressources et sans espoir.

Dans ces lieux, la liberté se résume à peu de choses : jouer au ballon dans une flaque d’eau boueuse et rêver, quand on en a la force, à des jours meilleurs.

Inspiré du magnifique travail du photographe documentaire Renaud Philippe, Errance sans retour se détache du peloton des documentaires de camps de réfugiés par son espèce de laisser-vivre, de laisser-faire, d’abandon, rarement vus.

Non seulement le film est exempt de pathos, non seulement évite-t-il les pièges d’appuyer sur la misère, il est au contraire traversé d’une certaine poésie, d’une ambiance métaphysique où le seul lien avec le XXIsiècle passe par les quelques téléphones cellulaires apparaissant de temps à autre.

On se surprend à faire le constat que tout est paisible dans ce camp. On voit, en entend de l’amour dans les familles. Voilà qui est beau. Mais cela n’empêche pas les deux réalisateurs de soulever des pierres au détour pour nous dire que le danger guette. Ainsi apprend-on que des jeunes filles disparaissent sans laisser de traces.

Toute la photographie du film est extraordinaire. Au-delà de certains passages classiques (cuisine, lessive, enfants à l’école), la caméra prend du recul pour mieux nous faire voir, et vivre, l’espèce de prison à ciel ouvert dans laquelle sont confinés ces gens. Et lorsqu’elle se rapproche, c’est pour mieux nous faire comprendre qu’il y a de longs moments de la journée où ils attendent que quelque chose se passe.

Sortie en salle au Cinéma du Musée et au Clap (Sainte-Foy), le 26 février, et à la Cinémathèque québécoise, le 5 mars. Sur les plateformes des cinémas Beaubien, du Parc, du Musée, Le Clap et du Cinéma Moderne le 26 février.

AFFICHE FOURNIE PAR SPIRA

Errance sans retour, de Mélanie Carrier et Olivier Higgins

DOCUMENTAIRE
Errance sans retour
Mélanie Carrier et Olivier Higgins
Avec Kala Miya (Kalam) et les réfugiés rohingya du camp de Kutupalong au Bangladesh
1 h 28
★★★★