Non, Sacha Baron Cohen ne s’est pas assagi avec le temps. On croyait pourtant son Borat disparu à tout jamais dans le plus profond du fond de sa campagne du Kazakhstan, étant donné sa notoriété. Dans le premier volet de ses aventures cinématographiques, qui remonte à 2006, l’anonymat de l’humoriste constituait un atout pour profiter de la crédulité de ses interlocuteurs. Quatorze ans plus tard, comment s’y prendre alors que le personnage est devenu une vedette, tout autant que celui qui l’incarne ?

Sacha Baron Cohen a trouvé deux solutions. Comme on peut déjà le voir dans la bande-annonce, Borat Sagdiyev commencera à miser sur les déguisements pour faire son travail. Le journaliste s’est en effet vite rendu compte, dès son retour en mission spéciale en Amérique après avoir été condamné à vie aux travaux forcés au Kazakhstan pour avoir humilié la nation, qu’on le reconnaissait désormais dans la rue. Certains le pourchassent même pour obtenir son autographe.

La deuxième solution, accidentelle, est l’apport de la fille adolescente de Borat, Tutar. Cette dernière a en effet aussi fait le voyage — on vous épargne les détails — et les deux personnages se retrouvent presque dans une version hyper trash de Mon cirque à moi. Incarnée par Maria Bakalova, actrice de 24 ans qui peut facilement passer pour une adolescente, Tutar tient tout de son père, y compris sa propension à dire et à faire les pires choses en toutes circonstances, sans aucun filtre. Si le culot de Sacha Baron Cohen a déjà été reconnu et célébré, il faudra désormais faire de même pour celui de cette jeune femme.

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Maria Bakalova et Sacha Baron Cohen dans Borat Subsequent Movie, un film réalisé par Jason Woliner.

N’ayant visiblement pas froid aux yeux, Maria Bakalova se retrouve en outre à raconter devant un groupe de femmes conservatrices la découverte toute récente du plaisir sexuel qu’a faite Tutar, en employant des termes très peu fleuris. Elle se lance aussi dans une danse folklorique avec Sacha Baron Cohen au cours d’un bal tenu à Mason, en Géorgie, vestige d’une époque où les esclavagistes présentaient leurs jeunes filles « débutantes » à la haute société.

Un allié de Donald Trump

Parti avec la mission précise d’offrir à un proche du président américain un cadeau au nom du gouvernement kazakh, Borat parvient aussi à s’infiltrer dans le monde politique. À cet égard, on retiendra cette présence à une conférence donnée par le vice-président Mike Pence. On ne peut passer sous silence non plus un épisode extrêmement troublant — il l’est d’autant plus quand on ne s’y attend pas — dans lequel est impliquée une personnalité politique bien en vue. Pour ne pas gâcher l’effet auprès de ceux qui ne sauraient pas encore de qui — ni de quoi — il s’agit, gardons ici le mystère.

Là réside d’ailleurs la meilleure astuce du personnage. Raciste, misogyne et intolérant sous toutes ses coutures, Borat trouve en Donald Trump un allié qu’il admire, en qui il se reconnaît enfin. D’où sa capacité à tirer les pires confessions des partisans du président, y compris des conspirationnistes. Souvent de façon hilarante, Sacha Baron Cohen fracasse toute notion de rectitude politique, même si, cette fois-ci, la manière est plus prévisible.

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Borat Subsequent Moviefilm, de Jason Voliner

Tourné en secret et en partie pendant la pandémie, ce film dont tout le monde ignorait l’existence jusqu’à tout récemment pourrait bien être la fameuse « surprise d’octobre » de cette élection présidentielle.

Borat Subsequent Moviefilm : Delivery of Prodigious Bribe To American Regime For Make Benefit Once Glorious Nation of Kazakhstan (Borat, le film d’après – L’incroyable subterfuge au régime américain pour mettre en lumière la nation du Kazakhstan, jadis si glorieuse en français) est offert en exclusivité sur Amazon Prime Video.

★★★½

Borat Subsequent Moviefilm. Comédie satirique de Jason Voliner. Avec Sacha Baron Cohen, Maria Bakalova
1 h 36.