Hanté par son enfance sous les nazis, un étudiant aux beaux-arts découvre à travers une démarche artistique que le père de son amoureuse, médecin et professeur émérite, a participé à des activités criminelles quelques décennies plus tôt.

Le récit du nouveau film de Florian Henckel von Donnersmarck commence en 1937 en Allemagne et prend fin environ trois décennies plus tard. Cette période tragique, très riche sur le plan historique, prend ici les allures d'une fresque où la part intime des êtres est bouleversée par les tourments de l'Histoire.

Quand sa tante non conformiste l'emmène dans un musée à Dresde, le petit Kurt subit deux chocs : celui que lui procure l'art lui-même, d'une part, mais aussi celui qu'il ressent à l'écoute d'une guide qui explique que les oeuvres proposées dans cette exposition singulière ont été commises par des artistes étrangers « dégénérés ». Au fil de son récit, le réalisateur de La vie des autres décrit le parcours de ce garçon, dont l'enfance sera aussi marquée par le départ de sa tante, désignée « mentalement dérangée », vers un camp de concentration.

Après la guerre, Kurt (Tom Schilling) devient un artiste peintre doué, mais puisqu'il vit désormais dans la partie est de son pays divisé, il doit se plier aux diktats du régime communiste. Seul l'art relevant du « réalisme socialiste » est toléré. Aussi tombe-t-il amoureux d'une jeune femme (Paula Beer, révélée grâce à Frantz) avec qui il aura envie de passer à l'Ouest, tout juste avant la construction du mur de Berlin.

Librement inspiré de la vie de l'artiste Gerhard Richter, Never Look Away s'étire sur un peu plus de trois heures en maintenant un bon rythme. L'angle le plus intéressant du récit est sans contredit celui où la vérité historique se révèle progressivement à travers une démarche artistique. En découle un formidable plaidoyer en faveur de l'art. Et de sa pertinence.

Notez que Never Look Away est à l'affiche en version originale allemande avec sous-titres anglais.

***1/2

DRAME. Never Look Away, de Florian Henckel von Donnersmarck. Avec Tom Schilling, Sebastian Koch, Paula Beer. 3 h 08.