Il a déjà souvent été dit que Belles familles était une comédie «à l'ancienne, comme il ne s'en fait plus». Cela n'a rien de péjoratif, au contraire. Ce nouveau film de Jean-Paul Rappeneau, qui n'avait pas réalisé de long métrage depuis Bon voyage, réunit en effet les plus belles qualités d'un genre aujourd'hui disparu.

Car tout, ici, est dans la belle manière, dans l'élégance du verbe, dans l'efficacité sans faille d'une mécanique bien huilée, dans la précision d'une mise en scène où rien n'est laissé au hasard. Bref, tout, ici, réside dans l'amour du travail bien fait. Un charme délicieusement suranné émane de cette comédie de boulevard habilement construite, complètement dénuée de cynisme et de vulgarité. Franchement, ça change.

Le vétéran cinéaste, qui a immortalisé Cyrano de Bergerac sur grand écran il y a plus de 25 ans, orchestre dans son nouveau film une rencontre entre le monde ancien et le monde moderne. Il dresse ainsi le portrait contemporain d'une famille que le passé vient inévitablement rattraper.

Comme bon nombre de ses compatriotes, Jérôme Varenne (Mathieu Amalric) vit à l'étranger depuis quelques années. C'est à Shanghai que ce professionnel français a fondé une famille, tout en brassant ses affaires. À la faveur d'un rendez-vous à Londres, Jérôme décide de surprendre sa famille en se pointant à Paris, le temps d'une petite visite. Il apprend alors que la maison familiale de province est au coeur d'un conflit juridique depuis la mort de son père. Aussi prendra-t-il les moyens pour en avoir le coeur net.

Une histoire en cache une autre

Cet imbroglio force en outre l'homme à replonger dans une dynamique familiale quasi immuable (Nicole Garcia incarne sa mère et Guillaume de Tonquedec, son frangin jaloux), à laquelle s'ajoute maintenant tout un pan inconnu de la vie du père disparu.

On s'en doute bien, l'histoire officielle en cache une autre, plus intime, plus difficile à percer. Parce que protégée par tous les petits notables de l'endroit.

Le regard que porte Rappeneau sur la vie de province - qu'il a lui-même bien connue dans son enfance - n'est certes pas aussi féroce que celui de Chabrol, mais il n'en est pas moins savoureux.

Dans ce film choral dont le rythme trépidant ne faiblit jamais, Jean-Paul Rappeneau met aussi en valeur une imposante distribution, constituée uniquement d'actrices et d'acteurs avec qui il n'avait encore jamais travaillé. Mathieu Amalric se fond avec une grande aisance dans cet univers en trouvant toujours la juste note, sans ne jamais chercher l'effet. Marine Vacth, Gilles Lellouche, Karin Viard, Nicole Garcia, Guillaume de Tonquedec, André Dussollier, Gemma Chan et Yves Jacques prennent tous visiblement plaisir à jouer leur partition respective.

Les admirateurs de comédies françaises de facture classique retrouveront avec plaisir un cinéaste à qui l'on doit notamment La vie de château et Le sauvage. D'autant qu'il affiche ici une forme splendide.

* * * 1/2

COMÉDIE. Belles familles. De Jean-Paul Rappeneau. Avec Mathieu Amalric, Marine Vacht, Gilles Lellouche et Karin Viard. 1h53.

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PHOTO FOURNIE PAR AXIA FILMS