Truman fait partie de ces films qui font du bien au coeur et à l'âme. Même si le ressort dramatique sur lequel est construit tout le scénario est déjà usé à la corde, force est de reconnaître que grâce à une approche intelligente, originale et sensible, cette comédie dramatique venue d'Espagne tire fort bien son épingle du jeu.

Réalisé par le cinéaste catalan Cesc Gay, dont les films précédents n'ont pas vraiment eu d'écho sur le plan international, Truman est d'abord et avant tout une histoire d'amitié, déployée dans un contexte où le temps se fait désormais plus précieux.

Quand il quitte la ville canadienne non identifiée dans laquelle il habite maintenant pour aller passer quatre jours à Madrid, Tomás (Javier Cámara) ne pense pourtant pas faire face à la mort. Enfin si, peut-être. Son meilleur ami Julián (Ricardo Darín), un acteur de théâtre, se sait condamné à plus ou moins brève échéance. Et si ce dernier accueille avec bonheur la visite-surprise de cet ami intime, il se méfie aussi un peu. Tomás aurait-il été appelé à la rescousse par la famille afin de persuader Julián de poursuivre les traitements qu'il vient d'abandonner?

La toute première préoccupation de Julián est toutefois de trouver un foyer d'accueil pour son vieux chien Truman, le seul être vivant qui partage son quotidien. Et qui, contre toute attente, risque de lui survivre.

Dans la première partie du récit, le cinéaste emprunte principalement le regard de Tomás, ce visiteur «venu du pôle Nord», qui, notamment, arbore fièrement un t-shirt des Jeux olympiques de Montréal de 1976. Ce dernier doit en outre s'adapter alors à une situation inattendue.

Deux acteurs d'exception

Sans jamais évacuer le drame, Cesc Gay mise beaucoup sur l'humour que pratiquent les deux hommes afin d'aborder directement des enjeux qui, autrement, auraient facilement pu être traités de façon trop appuyée.

Une virée à Amsterdam, où vit un fils aux études, donnera lieu à l'un des moments les plus loufoques, mais aussi les plus poignants du film. Il en est de même quand vient cet instant où le directeur du théâtre dans lequel Julián gagne sa vie depuis longtemps doit lui faire une annonce.

Les plus belles scènes du film sont celles où les deux hommes profitent tout simplement du temps qu'ils passent ensemble en se disant tout et rien à la fois. Parce qu'on sait qu'il s'agira de la dernière fois.

À ce chapitre, Truman bénéficie assurément de la présence de deux acteurs d'exception.

Ricardo Darín (Les nouveaux sauvagesDans ses yeux) module avec adresse les subtilités d'un personnage qui camoufle ses angoisses sous une bonne couche d'humour noir. Avec l'excellent Javier Cámara, l'un des acteurs fétiches de Pedro Almodóvar (Parle avec elleLa mauvaise éducation), la superstar argentine forme un tandem complice.

Rappelons qu'en plus de valoir aux deux acteurs un prix d'interprétation conjoint au festival de San Sebastián l'an dernier, Truman a obtenu en Espagne cinq prix Goya (l'équivalent des Oscars) dans des catégories de pointe: film, réalisation, scénario original, acteur (Darín) et acteur de soutien (Cámara).

Truman, il est vrai, est un film très attachant. Il prend l'affiche chez nous dans sa version originale espagnole avec des sous-titres en français.

* * * 1/2

COMÉDIE DRAMATIQUE. Truman. De Cesc Gay. Avec Ricardo Darín, Javier Cámara et Dolores Fonzi. 1h48.

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