Il était une fois, une nourrice berbère, Jenane. Ses chansons et ses contes bercent deux enfants: son fils, Asmar, et le petit Azur. Asmar a les cheveux noirs comme de l'ébène. Azur, les yeux bleus, les cheveux blonds, est le fils du châtelain. Nous sommes en France, au Moyen-Âge.

Azur et Asmar s'aiment et sa chamaillent comme des frères. Un jour, le châtelain décide de ramener son jeune fils au château, et de lui enseigner la danse, l'équitation, le latin, toutes ces nobles activités de prince. Asmar l'observe et apprend avec lui.

Puis Azur est brutalement emmené chez son précepteur, loin du château. Et le châtelain somme l'ancienne nourrice, désormais inutile, de prendre son fils et de retourner, sans autre forme de procès, «dans son pays».

Azur grandit loin d'Asmar et des contes de son enfance. Adulte, il décide de traverser la mer, pour retrouver le beau pays de sa nourrice. Son arrivée est marquée par une langue, une culture, des coutumes qu'il ne connaît pas, et est vite tenté de rejeter.

Quand il retrouve sa nourrice, devenue une riche commerçante, il lui confie son rêve: aller délivrer la Fée des Djinns, dont elle lui avait si souvent parlé. Asmar se prépare lui aussi à cette mission périlleuse, qui requiert bien plus que de la force.

Après les aventures de Kirikou, Michel Ocelot signe, avec son quatrième long métrage d'animation, un nouveau conte inspiré et inspirant. Bien plus que de magnifiques palais, de princes et de princesses, c'est de tolérance dont il est ici question.

Contre l'étroitesse d'esprit, Michel Ocelot suggère avec cette fable que l'on ne peut voir les beautés du monde que si l'on prend la peine d'ouvrir les yeux. Et que ce n'est pas parce que l'on est perdu dans une nouvelle culture qu'il faut dénigrer ce qu'un pays peut avoir à offrir, pas plus qu'il ne faut s'enfermer dans de douloureuses rancoeurs.

Puisqu'il s'agit d'une fable, Michel Ocelot a judicieusement choisi de situer son histoire au Moyen-Âge, dans un contexte où la civilisation musulmane avait plus qu'une longueur d'avance sur les pays chrétiens pour ce qui est des sciences et de la tolérance.

Dans la ville idéale où vit Jénane, les mosquées côtoient les églises et les synagogues, musulmans, chrétiens et juifs ont tous droit de cité dans l'espace publique. Les bâtiments de cette cité idéale sont directement inspirés de bâtiments de Grenade (Espagne), d'Istanbul (Turquie) et de Carthage (Tunisie).

On l'aura compris, le spectateur évolue chez Michel Ocelot à des années-lumières du petit racisme ordinaire. Mieux: il voit un monde et un univers, d'autant plus riche qu'il est varié. «Je connais deux pays, deux langues, deux religions, j'en sais deux fois plus que les autres!», lance Jénane. Un message que l'on pourrait taxer de candide, mais qui mérite d'être répété pour être peut-être entendu.

Ce message est admirablement bien servi par la qualité des images. Pendant plusieurs années, Michel Ocelot a travaillé les visages et les mains de ses personnages, en 3D, incrustés sur des décors en 2D. Le résultat est un bonheur de précision, de beauté cristalline.

Quant à la musique, forcément orientale, soulignons la collaboration de la chanteuse algérienne Souad Massi, qui interprète la chanson thème du film. Le tout est d'une beauté et d'une intelligence plus que rafraîchissantes. Un bonheur pour les enfants, mais aussi pour leurs parents.

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Azur et Asmar, conte animé de Michel Ocelot.

Azur et Asmar sont élevés comme des frères avant d'être brutalement séparés. Devenu grand, Azur n'a qu'une envie: retrouver son ancienne nourrice et son frère de lait, Asmar, et surtout, délivrer la Fée des Djinns.

Un conte sur la tolérance, superbement mis en image et en musique.