La bande-annonce dit tout mais montre peu : Saw III est l'aboutissement spectaculaire et grandguignolesque d'une trilogie horrifique particulièrement hard, du moins selon les standards du cinéma commercial américain. Cet épisode - qu'on espère le dernier - livre effectivement au menu ses gallons de sang, ses assiettées de tripes et ses tasses de dégueulis.

En cela il ne diffère pas tellement du précédent opus, lequel aussi, par son verni d'ingéniosité scénaristique, tâchait de camoufler sa vocation gore et masquer sa véritable raison d'être : donner mal au coeur. On ne sait trop par quel tour de passe-passe les trois Saw ont réussi à passer pour des films supérieurement intelligents (comparés à la masse des produits du même genre, sans doute).

Succès inattendu, Saw, l'original créé par les inconnus James Wan et Leigh Whannell, à l'intrigue recousue en tous sens, n'était pas si bête. Le second, aussi potable et populaire, n'a pas séduit les fans purs et durs. Ce dernier est une bonne blague ou une insulte. Un feu roulant de violence et d'énergie, une orgie sanglante, un festival de tortures, certes, mais un très mauvais thriller, embarrassant à force de prétention.

Rappelons brièvement les faits : un type vicieux et rongé par la maladie (Tobin Bell) s'amuse, avec l'aide d'une jeune protégée (Shawnee Smith) à piéger des gens, à les enfermer dans quelque entrepôt désaffecté et à les soumettre aux pires sévices mentaux et physiques. Il s'agit pour le maître d'un jeu. Afin de s'en sortir idéalement sains, au moins de corps, les victimes doivent faire preuve d'astuce et être bien à l'affût des milles petits indices que laisse traîner le bourreau à travers un réseau de chambres des tortures (dont la plupart du temps personne ne sort vivant). Les supplices infligés ici feraient bander les plus sadiques tourmenteurs de l'Inquisition espagnole : une femme nue dans une chambre froide, régulièrement aspergée d'eau jusqu'à devenir une véritable momie de glace (vivante!) Un monsieur attaché au fond d'une sorte de puits et sur qui sont déversées des quantités de viande pourrie liquéfiée. Un pauvre noir écartelé, ou plutôt tordu comme une guenille, par une machine infernale. Voyez qu'on trempe dans le rouge et dans le brun.

Sorte de croisement bizarre entre les The Abominable Dr.Phibes des années 70 avec Vincent Price et le Seven de David Fincher, comique (plus ou moins volontairement) à force d'excès jusqu'au délirant final d'apocalypse, Saw III (réalisé une fois de plus par Darren Lynn Bousman, toujours convaincu qu'il a créé un style) est une caricature involontaire de l'original. Autrement dit, un film sans conséquence, un tour de manège qui ne laisse qu'une vague impression de vertige et de haut-le-coeur.

Depuis le traumatisant Hostel d'Eli Roth, obscurément pertinent, la barre est haute dans le sous-genre très spécifique et pourtant populaire des films de torture...

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Saw III (V.F. DÉCADENCE III)

Film d'horreur de Darren Lynn Bousman. Avec Tobin Bell, Shawnee Smith, Angus Macfadyen.

L'affreux psychopathe Jigsaw, à l'approche de la mort, a réservé ses meilleurs trucs dans son sac à sévices.

Dernier tour de manège dans la maison des horreurs