Hommage surréaliste à une grande artiste, énième relecture «adulte» d'Alice au pays des merveilles et variation érotico-beatnik sur le thème de la belle et la bête, avec clins d'oeil au Freaks de Tod Browning, Fur: An Imaginary Portrait of Diane Arbus est sans doute l'un des films les plus bizarres de ces dernières saisons.

Curiosité inclassable ou laborieux exercice de style, quoi qu'il en soit cette soucoupe volante ne tourne pas rond. Dans l'étonnante filmographie de Nicole Kidman, on le rangera à côté de Birth parmi les oeuvres insolites qui n'attirent pas facilement les foules et qui laissent la critique un peu décontenancée.

Kidman incarne donc ici une jeune Diane Arbus, célèbre photographe new-yorkaise qui a connu ses grandes heures de gloire durant les années 60 grâce à ses nombreux clichés de marginaux, d'éclopés, de vieillards, d'handicapés, de clochards et de tous ces gens «physiquement diminués» qu'on assimilait autrefois à des phénomènes de foire.

Dans cette fantaisie totale qui n'a rien d'une biographie, Arbus est initiée à la faune très underground des freaks de New York par l'intermédiaire d'un mystérieux voisin, Lionel (Robert Downey Jr.), un homme de qualité, cultivé et tout, mais atteint d'une maladie rare qui l'oblige à camoufler son visage, d'une pilosité extrême. Arbus et Lionel entretiendront pendant un certain temps une relation proche de l'adultère, jusqu'à passer à l'acte après une longue séance d'épilation et de rasage. Tout cela relève évidemment de la pure fiction, Fur étant en bout de ligne un film fantastique déguisé en mélodrame intello.

Bizarre, disions-nous. Et gauche. En certains moments, on ne peut s'empêcher de pouffer. Sans doute le réalisateur Steven Shainberg a-t-il voulu, en toute bonne foi et à l'instar de son idole Arbus, provoquer le spectateur en lui présentant un personnage difforme ou mal servi par la nature. Mais Fur ne suscite aucun véritable malaise (sinon que par la mise en scène maladroite et un scénario faussement profond) ni aucune empathie envers ce pileux Lionel.

Kidman prend sa pose «cochonne» façon Eyes Wide Shut, et Downey Jr., sous un maquillage approximatif, débite de sa très belle voix un texte vaseux. Au consommateur ordinaire qui n'aime pas les films compliqués, Fur offre tout de même quelques jolies scènes bien salées.

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FUR, drame de Steven Shainberg. Avec Nicole Kidman, Robert Downey Jr., Ty Burrell.

Genèse imaginaire de la carrière artistique de la photographe américaine Diane Arbus.

Oeuvre insolite, honnête mais ratée, qu'on rangerait quelque part entre le fantastique, la biographie, le pensum intello et le film de cul chic.