Il en restait quatre. Quatre joueurs laissés derrière parce qu'ils étaient blessés ou, comme celui-là, parce qu'il avait passé tout droit et raté l'avion. Il restait aussi un entraîneur-adjoint qui, ayant des recrues potentielles à rencontrer sur le chemin du retour de la Caroline, avait pris la route; les conséquences de ce choix l'amèneront bien au-delà de sa propre survie.

Les 55 autres joueurs sont morts dans l'écrasement, survenu par mauvais temps peu avant l'atterrissage à Huntington. Bilan final : 75 morts. Ça c'est passé dans la vraie vie, le 14 novembre 1970. Comme toutes ses pareilles aux États-Unis, la petite ville de la Virginie occidentale avait toujours vibré au rythme de l'équipe de football de son université. Mais là, Marshall n'a plus d'équipe, plus de joueurs, plus de coaches. Plus d'âme presque.

Faut-il continuer, monter une équipe de recrues qui, forcément, ne saurait être à la hauteur de celle que le destin a fait disparaître? Le cas échéant, comment y arriver sans les étudiants de première année que le règlement national empêche de s'aligner dans les équipes universitaires? Et qui voudra diriger une telle équipe en ces circonstances?

Déjà entraîneur dans une petite université d'un État voisin, Jack Lengyel (McConaughey) pose sa candidature. Il n'est même pas un ancien de Marshall; il a, explique-t-il au doyen (Straithairn), d'autres raisons de vouloir ce poste...

We are Marshall platement intitulé L'esprit d'une équipe dans sa version française par ailleurs impeccable repose tout entier sur les épaules de Matthew McConaughey, qui était l'invité des annonceurs de Monday Night Football, lundi passé à ESPN (TSN). Lengyel était un coach tout à fait allumé mais sans les excès de «personnalité» observés chez tant de coaches de football, demi-dieux du panthéon américain (Lengyel deviendra directeur athlétique de l'académie navale d'Annapolis, siège prestigieux de la grande équipe de la Navy).

Dans le style drame sportif, Hollywood en a toujours beurré pas mal épais mais il faut souligner ici la sobriété de la réalisation de McG (Charlie's Angels Full Throttle) : le drame de Marshall n'avait, n'aura jamais besoin de surenchère. Le film n'en présente pas moins la plupart des grands clichés ou sont-ce les mythes fondateurs? du football collégial américain : le couple star-cheerleader et le tandem père-fils, la prééminence du personnage du coach, la résonance de l'équipe par-delà les limites du terrain. Même la tarte aux pommes s'est trouvé un petit rôle dans We are Marshall...

Bien qu'il dépasse largement les frontières sportives, ce film rappelle, sans nous le lancer à la figure, que le sport et, au premier chef, le football, reste un lieu de rencontre privilégié entre l'individu et la collectivité. Quelles que soient les circonstances.

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* * * 1/2

WE ARE MARSHALL (V.F. : L'ESPRIT D'UNE ÉQUIPE), drame sportif réalisé par McG. Avec Matthew McConaughey, Matthew Fox et David Straithairn.

Une petite université cherche sa voie après la disparition de son équipe de football dans un accident d'avion. Inspiré d'un fait vécu.

Malgré les nombreux dangers de surenchère pathétique, le film reste assez sobre. Une performance convaincante de McConaughey.