Ce qui séduit d'abord dans Congorama, c'est la façon habile avec laquelle l'auteur cinéaste Philippe Falardeau a construit son récit. La maîtrise dont il a su faire preuve en jonglant avec autant d'éléments impressionne tout autant.

Pas évident, en effet, d'aborder autant de thèmes - dont certains ont un caractère tragique - avec un style aussi personnel, en maintenant de surcroît un caractère ludique et léger qui désamorce l'aspect dramatique de certaines situations.

La fluidité avec laquelle Falardeau démêle les fils d'un récit dont les intrigues sont campées sur deux continents est aussi remarquable.

Ainsi, les scènes plus tristounettes du début, nécessaires dans la mesure où celles-ci nous exposent le contexte dans lequel vit l'un des protagonistes, nous entraîneront bien vite dans un voyage intérieur joyeusement bordélique.

Un ingénieur belge âgé d'une quarantaine d'années, Michel Roy (excellent Olivier Gourmet), apprend en effet la vérité sur ses origines dans le regard d'un père écrivain tétraplégique (remarquable Jean-Pierre Cassel). Qui ne lui avait jamais révélé qu'il était, en fait, né au Québec, et qu'il avait été adopté à l'époque par une famille belge.

Le destin fera encore des siennes le jour où, cherchant ses racines dans le petit village de Sainte-Cécile, Michel est victime d'un accident.

La voiture hybride dans laquelle il se trouve, conduite par Louis Legros (Paul Ahmarani, aussi excellent), frappe en effet un émeu égaré au milieu de la route...

Falardeau accouche ainsi d'une histoire aux ramifications complexes, dans laquelle sont évoqués des thèmes à caractère intime (l'hérédité, le rapport à la famille) et social (l'environnement, la francophonie, la mondialisation).

La quête existentielle de Michel, qui a perdu bien des repères, se révèle touchante, tout autant que celle de Louis. Ce dernier a en effet visiblement été blessé intérieurement par la fuite d'un père dont les élans créatifs ont été neutralisés au moment où il s'apprêtait à mettre au point une invention qui aurait révolutionné le monde de l'automobile.

Le choc culturel qui frappe Michel au Québec est aussi évoqué d'une manière qui n'appuie pas trop sur les clichés habituels. De même, la part belge du récit, dans laquelle on découvre la femme congolaise de Michel et leur fils, est magnifique de sensibilité et de délicatesse.

Belle idée, aussi, que d'évoquer le rapport au monde de la Belgique et du Québec à travers les deux expositions universelles tenues en 1958 et en 1967.

Le titre du film provient d'ailleurs d'un spectacle «son et lumière» célébrant le Congo lors de l'expo de Bruxelles.

Le réalisateur de La moitié gauche du frigo peut en outre s'appuyer sur les prestations solides de ses têtes d'affiche. Aussi improbable que semble paraître leur réunion sur papier, Olivier Gourmet et Paul Ahmarani se complètent à merveille.

Les deux acteurs forment un duo inédit, moteur d'une histoire originale où l'on préfère emprunter des chemins de traverse plutôt que des sentiers bien balisés.

De ce choix résulte parfois de petits flottements sur le plan narratif, mais le périple vaut quand même largement le détour.

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CONGORAMA. Comédie dramatique de Philippe Falardeau. Avec Olivier Gourmet, Paul Ahmarani, Jean-Pierre Cassel, Lorraine Pintal. 1 h 45.

Un ingénieur belge rapplique à Sainte-Cécile quand il apprend qu'il est né au Québec...

Un récit aux ramifications complexes, défilé sur un mode ludique et léger.