La parenthèse intimiste aura été de courte durée pour Zhang Yimou. Après le plus modeste Riding Alone for Thousands of Miles, le cinéaste chinois revient avec un film historique à grand déploiement, qui rappelle ses fresques à succès, Hero et Le secret des poignards volants.

Grand déploiement est un bien faible mot, puisque La malédiction des fleurs dorées serait, avec son budget de 45 millions de dollars, le film le plus coûteux de l'histoire du cinéma chinois. On peut comprendre. Des mois de tournage, des costumes d'époque flamboyants, des décors fastueux et plus de 1000 soldats véritables ont été nécessaires pour recréer la période médiévale la dynastie Tang.

Le résultat est éblouissant... même si l'histoire prend parfois des allures de soap impérial.

Bon. On n'est pas fins, là. En fait, La malédiction des fleurs dorées ressemble plus à Hamlet qu'à Dallas. Vengeance, intrigues royales, meurtres et passions exacerbées: tous les ingrédients du drame shakespearien sont ici réunis. Mélange d'autant plus explosif qu'il est brassé dans le vase (Ming?) clos de l'impénétrable Cité interdite, où vivaient l'empereur et les siens.

Inspiré de faits réels, La malédiciton des fleurs dorées, se déroule au Xe siècle, pendant une période tumultueuse de l'histoire chinoise. Parce qu'il soupçonne sa seconde épouse (Gong Li) d'avoir une relation avec le fils qu'il a eu d'une première femme, l'empereur (Chow Yun Fat, méconnaissable) décide d'empoisonner celle-ci à petit feu. L'ayant appris, l'impératrice complote avec son propre fils pour se faire justice. Plus le plan se précise, plus chaque membre de cette famille incestueuse et dysfonctionnelle dévoilera ses secrets, le tout culminant en un drame politique d'une violence inattendue.

Moins «art martial» que Hero (Chow Yun Fat n'est pas Jet Li!) le nouveau Zhang Yimou semble tiraillé entre le film d'action et le mélodrame. Enfin, peut-être est-ce un peu des deux. Si la première partie permet de cerner les enjeux et les déchirements intimes de chacun, la seconde donne lieu à des scènes de bataille quasi-épiques, qui prennent il va sans dire une dimension supplémentaire sur grand écran.

Mais quel que soit le mode, on retiendra surtout le soin obsessif apporté à l'esthétique. Dans cet univers schizophrénique (la cour impériale), aucun détail visuel ne semble laissé au hasard, que ce soit les costumes (hallucinants) ou le palais lui-même, avec ses éclairages irréels et ses aveuglants parterres de chrysanthèmes jaunes (d'où le titre). Fidèle à sa réputation, Yimou compose d'impressionants tableaux de maître, donnant à la couleur et à sa symbolique le véritable premier rôle de son film.

Certains trouveront cet aspect poussé à l'exagération, au détriment d'un certain réalisme. Vrai que la forme l'emporte ici sur le fond à l'image de ce royaume déclinant, resplendissant à l'extérieur, mais pourri de l'intérieur. Mais il faut voir La malédiction des fleurs dorées pour ce qu'elle est: une somptueuse et spectaculaire tragédie grecque... à la chinoise.

La malédiction des fleurs dorées, drame historique de Zhang Yimou, avec Chow Yun Fat, Gong Li et Jay Chou.

Complots, intrigues et coups d'état à la cour de l'empereur de Chine, pendant la dynastie Tang, au Xe siècle.

Un soap historique flamboyant, où violence et beauté se côtoient dans la plus grande splendeur. À voir absolument sur grand écran.