Un prof de littérature peut-il éviter un drame s'il décèle la violence dans les écrits? La question avait été soulevée la semaine dernière lors des événements de Virginia Tech. Par un (mal)heureux hasard, le long métrage 2:37, qui prend aujourd'hui l'affiche au Québec, fait écho à la grande tuerie américaine.

À 2h37, un drame se noue dans un lycée australien. Drame mortel dont le spectateur ne connaît, au début du film, ni la victime, et encore moins les raisons. La marche ralentie des étudiants ne laisse place qu'à une certitude : à 2h37, ce seront plus d'une vie qui seront soufflées par le drame.

2:37 remonte le cours de la journée tragique, et refait les ultimes gestes de six adolescents. Des gestes qui annoncent le drame dans leur banalité : la chambre à coucher où l'on se pomponne est aussi une geôle; les toilettes où l'on s'embrasse sont aussi un lieu d'isolement.

Boulimie, inceste, grossesse, homosexualité, drogue, suicide et violence. Pour son premier long métrage, Murali K. Thalluri ne laisse aucun tourment adolescent de côté, sans parvenir à dépasser ce qui a déjà été vu et montré maintes fois (American Beauty, American Splendor, Welcome to the Dollhouse).

Remonter les fils conduisant à la tragédie aurait été un procédé original si Gus Van Sant ne l'avait pas utilisé dans Elephant, sur un sujet très proche : une tuerie dans un lycée américain. Dans 2:37 comme dans Elephant, les adolescents évoluent dans une atmosphère vaporeuse, une bulle dont on sait l'éclatement prochain. Dans 2:37 comme dans Elephant, la même scène est filmée plusieurs fois, pour épouser le point de vue des personnages.

Dommage également que Thalluri ait senti le besoin de ponctuer le film de commentaires a posteriori de ses personnages. Le procédé n'est d'ailleurs pas sans rappeler la télévision dans ses formes les plus diverses : séries télé ou téléréalité.

Côté bande sonore, 2:37 ne frappe pas non plus par son originalité. Dès les premières notes du générique de début, on reconnaît le Requiem de Fauré, que Bill Murray écoute depuis son canapé, dans Broken Flowers, de Jim Jarmush.

En dépit d'une réalisation soignée et d'interprétations impeccables, le film oscille entre le passage en revue des maux adolescents et le suspense (qui va se suicider? et pourquoi?) sans parvenir à trouver sa voix. Le tout forme une démonstration vaine et convenue.

Espérons que pour son prochain long métrage, le jeune réalisateur, âgé d'à peine 23 ans (!), définira son propre style et évitera ainsi des comparaisons qui ne peuvent que lui être défavorables.

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2:37

**1/2


Drame de Murali K. Thalluri. Avec Teresa Palmer, Joel Mackenzie, Franck Sweet, Clementine Mellor, Charles Baird, Sam Harris.

À 2h37, un drame se noue dans les toilettes d'un lycée. Le film suit six adolescents.

Soigné, mais nullement personnel.