L'émission Fanfreluche a été diffusée de 1968 à 1972. Autant dire il y a un siècle. Malgré tout, la petite poupée russe n'a pas pris une ride. On s'en doutait, remarquez.

Quelques extraits, entrevus au fil des ans, laissaient deviner une éternelle fraîcheur. Mais après avoir vu le Tome 2 des aventures de Fanfreluche (12 épisodes tout juste ressortis en DVD par Radio-Canada), la chose se confirme. Malgré les défauts techniques, peu de nos émissions pour enfants ont aussi bien vieilli.

Il faut dire qu'au départ, le concept était génial: une poupée délurée pénétrait dans les livres de contes et mettait son grain de sel dans les histoires, provoquant toutes sortes de situations abracadabrantes. Et puis il y avait Kim Yaroshevskaya. Celle sans qui Fanfreluche n'aurait jamais existé. Madame n'a pas seulement inventé le personnage. C'est elle qui écrivait tous les textes. C'est aussi elle qui a créé la célèbre ritournelle du générique.

«L'idée m'était venue dans la douche», raconte la dame à la voix si reconnaissable. La comédienne admet avoir eu quelques bras de fer avec ses réalisateurs. Sa vision, bien arrêtée, ne faisait pas l'affaire de tout le monde. Surtout pas les décorateurs! On peut comprendre: Fanfreluche était une adepte du dépouillement! «Ce fut ma plus grande lutte à Radio-Canada, explique-t-elle. Je ne voulais pas de décors. Je ne voulais que l'essentiel. Les costumes, les accessoires, des dessins si besoin. Mais un décor, c'est encombrant pour rien!»

À la longue, Fanfreluche deviendra source de contrariété. La comédienne voulait réaliser ses propres épisodes. On le lui refusait. Les émissions étaient écourtées pour faire de la place à la pub. Enfin, il y avait l'âge. «Je voyais apparaître des rides, alors que je voulais, pour Fanfreluche, l'image d'une éternelle jeunesse... Je suis partie de moi-même», explique celle qui, ironiquement, jouera quelques années plus tard le rôle de la grand-mère dans Passe-Partout.

Kim Yaroshevskaya mettra du temps à mesurer l'importance de Fanfreluche. Même si elle y mettait toute son âme, la télé était, de son propre aveu, moins importante que le théâtre. Mais plus le temps passe, plus il semble évident que ce personnage de poupée «interventionniste» fut le plus marquant de sa longue carrière. «Le théâtre a pris l'essentiel de mon temps, Mais quand je vois ce qu'on retient de moi, je me dis que j'aurais pu faire moins de scène et un peu plus de télévision!»

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Fanfreluche me raconte , Tome 2 (Imavision/Radio-Canada)